Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

dimanche 7 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 34

Le baiser qu'on reçoit nous indique notre âge : frémissant dans la jeunesse, avec quel calme il tombe sur une vieille joue !

Une très belle religieuse a l'air de se donner deux fois à Dieu.

L'aspirant a le ton du locataire; l'amant, celui du propriétaire.

Une mère coquette défleurit la maternité.

Il semble qu'il y ait si longtemps qu'on soit vieux !

Sur ses longs doigts flétris, le passé compte nos ans. '

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

samedi 6 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 33

Piano, ne te plains plus de tes détracteurs : tu es vengé par le pianola.

Pauvre belle amoureuse! voyez-la faire son ronron quand on lui dit : Je t'aime.

Le souvenir des veufs est sujet aux nouvelles lunes.

Commencement de la perfection : Être persuadé que les autres sont plus parfaits que soi.

Ne rien donner, ni au hasard des mots, ni au hasard des choses : savoir où l'on va.

Ne te décide pas pendant l'orage.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

vendredi 5 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 32

L'esprit a aussi ses jours de grande et de petite marée.

Le temps a beau détruire, à peine s'il contente l'avidité de la mort.

L'homme qui dort bien n'a aucune excuse pour être méchant.

La bonté a des ailes, la charité a des mains.

Dans l'émotion, la musique va plus loin que la poésie, elle pénètre plus avant, elle touche l'âme de plus près, elle fait le ciel plus bleu.

Je n'aime pas les sentiments qui meurent goutte à goutte; je préfère ceux qui meurent brusquement.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

Miette 76 : Tous les renards se retrouvent chez le pelletier

L'expérience

Tous les renards se retrouvent chez le pelletier.

Sommaire. - La terreur des poulaillers. - Massacres justifiés. - L'égalité dans le néant. - Songe réaliste. - Horace traduit, non trahi.— Autre cloche, même son.

Pour bien saisir le sens de ce proverbe, il faut remonter le cours des ans. À l'époque où les renards foisonnaient, on se livrait à de cruelles hécatombes ayant pour excuse la protection des coqs, poules, poulets et poulaillers. On faisait alors un grand commerce de peaux de renard. Naturellement, le marchand ayant nom, le pelletier, en offrait un choix considérable, tous les renards se retrouvant chez lui.

Si les renards ont à peu près disparu et si les pelletiers ont été transformés en marchands de fourrures, le sens attaché au proverbe subsiste toujours et subsistera jusqu'à la consommation des siècles; c'est-à-dire que les hommes se retrouveront tous réunis un jour dans le néant et au même niveau d'une égalité parfaite.

Cette vérité a été rendue avec réalisme par un homme de lettres du nom de Patrix, attaché au frère de Louis XIII, Gaston d'Orléans, qui lui-même se piquait de poésie :

Je songeais cette nuit que, de mal consumé,
Côte à côte d'un pauvre on m'avait inhumé
Et que n'en pouvant pas souffrir le voisinage
En mort de qualité je lui tins ce langage :
« Retire-toi, coquin, va pourrir loin d'ici,
Il ne t'appartient pas de m'approcher ainsi.
— Coquin, ce me dit-il, d'une arrogance extrême,
Va chercher tes coquins ailleurs, coquin toi-même.
Ici tous sont égaux, je ne te dois plus rien,
Je suis sur mon fumier comme toi sur le lien. »

On n'est pas plus égalitaire.

S'inspirant des vers d'Horace :

Pallida Mors aequo pulsat pede pauperum tabernas
Regumque turres,
1

Malherbe a dit moins brutalement, mais avec non moins d'énergie :

La Mort a des rigueurs à nulle autre pareilles ;
On a beau la prier,
La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles
Et nous laisse crier.

Le pauvre, en sa cabane où le chaume le couvre,
Est sujet à ses lois,
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
N'en défend pas nos rois.2

Sous une autre forme on retrouve encore dans une ode d'Horace la même pensée que la mort nivelle tous les rangs, unifie toutes les conditions ; grands et petits se retrouvent au même plan :

Omnes codem cogimur, omnium
Versatur urna serius, ocyus
Sors exitura, et nos in aeternum
Exilium impositura cymboe,3

ce que l'on peut traduire approximativement :

La même loi s'étend sur les hommes divers ;
Ils sont tous attendus dans la nuit des enfers ;
Ils y tombent en foule; et dans sa frêle barque
Caron passe à la fois le Pâtre et le Monarque.


1 Ode IV, Ad Sestium, vers 13.
2 Malherbe, Stances à son ami Du Périer (1599).
3 Ode 3 du Livre II. Ad Q. Dellium, vers 25 à 28.

Émile Genest, Miettes du passé, Collection Hetzel, 1913. Voir la note du transcripteur.

jeudi 4 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 31

L'homme fort appréhende peu : il est prêt.

La gaucherie vient de l'inexpérience, la timidité souvent du désir de plaire.

Les artistes sont des aristocrates, que l'art prend où bon lui semble.

On était vertueux, on s'en vantait ; l'occasion n'avait pas passé, elle passe et emporte.

On se guérit trop bien de la timidité.

Faisons large part aux autres, n'étriquons pas notre indulgence.

On arrose les fleurs avec mesure : louons sans hyperbole.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

mercredi 3 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 30

Choisir est plus délicat qu'entasser.

Une maison riche peu peuplée de visiteurs me fait désirer d'en connaître les propriétaires.

Il fait toujours sombre dans un esprit étroit.

Il vaut mieux que la vie nous doive que de devoir à la vie.

Dieu a montré sa pitié pour la femme en lui donnant l'intuition.

Et puis, la tête un peu basse, la mine un peu sombre, la larme un peu coulante... on revient au mari.

Notre propre estime nous soutient, celle des autres nous récompense.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

Grand Prix de Londres 2012

Classement final
Cadence :120m:60m:15m+30spc(61)
Site officiel
POSJoueur0
1
0
2
0
3
0
4
0
5
0
6
0
7
0
8
0
9
1
0
1
1
1
2
Points
1Topalov,V ½½½½½1½1½1½7
2Mamedyarov,S½ ½0½½½½11117
3Gelfand,B½½ 0½1½1½1½17
4Grischuk,A½11 ½½½½½½½½
5Leko,P½½½½ ½1½½½½½6
6Wang Hao½½0½½ ½½½½½1
7Ivanchuk,V0½½½0½ ½½½½15
8Adams,Mi½½0½½½½ ½0½15
9Dominguez Perez,L00½½½½½½ ½½½
10Kasimdzhanov,R½00½½½½1½ ½0
11Giri,A00½½½½½½½½ 04
12Nakamura,Hi½00½½000½11 4


Choisissez une partie :

mardi 2 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 29

Les grandes innocences n'ont pas de honte si la science leur arrive un peu tard, plutôt un peu de fière satisfaction.

La vérité a peu de paroles ; elle les laisse au mensonge.

Les chauds mouvements préparent les belles oeuvres et les amènent à vivre.

Il ne faut qu'un regret pour nous ouvrir le ciel.

Dans la jeunesse, elle menace, dans la vieillesse, la mort réclame.

La persévérance est douce, l'obstination est querelleuse.

Savoir vivre amène à savoir mourir.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

lundi 1 octobre 2012

De toutes les Paroisses, page 28

Tant il est beau le sommeil, que les gens qui dorment peu pardonnent difficilement à ceux qui dorment beaucoup.

Des preuves ! est-ce qu'on ne peut pas en fabriquer ?

S'il prend à un paresseux l'envie de travailler, c'est surtout le dimanche.

Être sobre dans le faux, c'est une distinction.

La parure demande l'occasion, qui finit par coûter plus cher qu'elle.

On excuse l'amant qui vous ruine ; on est sévère pour le mari qui, en travaillant, n'arrive pas à contenter nos caprices.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

dimanche 30 septembre 2012

De toutes les Paroisses, page 27

Où en serions-nous si les conseils ne nous laissaient toute notre liberté !

C'est surtout quand on moralise qu'il faut être court.

Il ne faut pas consentir aux bêtises : attendre qu'elles nous surprennent.

Ah ! cette molle, celte inquiétante rêvasserie ! ce n'est pas le beau rêve, c'est son brouillard.

Pitié ! le mot par lequel l'humanité avoue sa faiblesse.

Lève la tête, ce geste-là soulage !

On prend l'air grave, sans tromper la gravité.

Anne Barratin, De toutes les Paroisses, Ed. Lemerre, Paris, 1913

Promenade de septembre

Montage mis en ligne par Marie.

samedi 29 septembre 2012

Miette 75 : Les moutons de Panurge

L'expérience

Les moutons de Panurge.

Sommaire. - Judicieuse remarque. - Une vengeance qui donne la célébrité.

Panurge était observateur ; il avait remarqué la tendance des moutons à suivre aveuglément celui qui tient la tête du troupeau.

S'étant, lors d'un voyage en mer, pris de querelle avec le berger Dindenault, il lui acheta une de ses bêtes qu'il jeta, criant et bêlant, dans la mer; tous les autres moutons de sauter à leur tour par-dessus bord: « car vous sçavez, dit Rabelais, estre du mouton le naturel, toujours suivre le premier, quelque part qu'il aille. » Ainsi Panurge fut vengé et rendit célèbres les moutons qui portent désormais son nom, bien que ne lui ayant jamais appartenu.

Ne voit-on pas de tous côtés des moutons, qu'ils soient de Panurge ou autres, tous gens imitant servilement le voisin et faisant une chose parce que les autres la font; c'est leur seule raison, ils n'en sauraient avoir de meilleure; la profondeur de leur esprit, l'acuité de leur intelligence se bornent à suivre la foule par mode ou par snobisme : Imitatores, servum pecus, « imitateurs, troupeau servile », s'écriait Horace indigné.

Qu'un seul mouton se jette à la rivière,
Vous ne verrez nulle âme moutonnière
Rester à bord : tous se noieront à tas.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le monde n'est que franche moutonnaille,1

murmure le doux La Fontaine.


1 La Fontaine, L'Abbesse, conte.

Émile Genest, Miettes du passé, Collection Hetzel, 1913. Voir la note du transcripteur.

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