Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

mardi 29 avril 2008

Parlez-vous Martineau?

- Tiens, lis ça.

Marie revenait de chez le dentiste. Dans la salle d'attente, elle était tombée sur l'article de Richard Martineau du Elle de décembre 2007 : « Parlez-vous Klingon? ». Il s'agit d'une petite page où le journaliste ridiculise le langage utilisé dans le programme de formation du ministère de l'Éducation.

- Tu as été choquée par l'article?

- En le lisant, je me disais que ce type n'y comprenait absolument rien.

Comme j'aime bien entendre les explications de ma chère épouse, je lui demandai de m'en dire un peu plus.

- C'est le cas évident d'un monsieur Tout-le-Monde qui n'y comprend absolument rien à la pédagogie et à l'évaluation.

- Ah oui ?

- Par exemple, il écrit : « Voici des indications pédagogiques concernant le cours de français. «L'étudiant doit apprendre à reconnaître et utiliser, dans la communication en présence, à distance, en direct et en différé, les marques verbales, paraverbales et non verbales qui contribuent à maintenir ou à accroître l'attention et l'intérêt... » (Traduction: l'étudiant ne doit pas être ennuyant quand il parle. Un conseil que n'ont manifestement pas suivi les rédacteurs de ce guide.) Croit-il vraiment qu'il suffit à un enseignant de dire à un élève "T'é ennuyant quand tu parles, donc je te donne 40%" Comme si cela pouvait aider un élève !

Marie était bien lancée. Elle poursuivit :

- Le texte du programme sert à un enseignant à aller beaucoup plus loin que ce « T'é ennuyant ». L'enseignant doit d'abord s'assurer que l'élève vivra différents contextes (présence, distance, direct, différé); Si l'élève est plate, il lui demandera de vérifier ses marques verbales, paraverbales et non verbales. Dire à une personne qu'elle est ennuyante, c'est simple. L'aider à se dépasser et à apprendre à ne plus l'être, ça c'est le travail du pédagogue et le programme est là pour donner des pistes sur comment aider un élève à s'améliorer. La traduction de M. Martineau n'est d'aucune utilité à l'enseignant.

- Il ne sait donc pas de quoi il parle.

- Il n'a pas à évaluer des élèves. Le pédagogue doit avoir des indications sur ce qu'il doit observer, sur les contextes d'apprentissage et plus en encore. C'est à cela que sert un programme.

- En effet. Et qu'as-tu à me dire à propos de cette autre partie de son texte : «L'étudiant doit reconnaître et utiliser les marques linguistiques (coordonnants, subordonnants, adverbes, prépositions, présentatifs, groupes de mots ou phrases) qui sont des organisateurs textuels, des marqueurs de relation ou des formules de transition et qui permettent de déterminer et de hiérarchiser les différentes parties du texte.» (Traduction: l'étudiant doit savoir comment construire une phrase.)

- Bien sûr que l'étudiant doit savoir construire une phrase. C'est une vérité de La Palice. Mais si l'élève ne sait pas comment, va-t-on juste lui dire « Tu as 40% car tu construis mal tes phrases ? » Encore une fois, M. Martineau n'a pas à évaluer, car s'il devait le faire il serait bien content qu'on lui donne des pistes d'évaluation. Le texte du MELS, c'est exactement ce qu'il donne. C'est normal que le journaliste n'y comprenne rien, car il n'est pas pédagogue. Lui prendrait-il l'idée de dire à un ingénieur qu'il parle Klingon parce qu'il ne comprend pas comment construire un pont et que la seule indication «Le pont ne doit pas être croche» lui apparaîtrait suffisante ? Certainement pas. Mais il se mêle de traduire le programme...

- Tu aurais donc un argument semblable pour cet autre extrait : «Pour qu'il y ait communication entre interlocuteurs ou entre un locuteur et un auditeur, il doit y avoir engagement dans l'échange, production de signes manifestant cet engagement (ex: salutation, orientation du corps, prise en compte explicite de caractéristiques du destinataire) et évitement des comportements contradictoires. La prise de parole ne suffit pas.» (Traduction: avant de parler à quelqu'un, assure-toi donc que la personne veut discuter avec toi.)

- Bien sûr. La traduction est tellement simpliste. Comme s'il était suffisant des s'assurer que la personne veuille bien discuter. Comment un élève doit-il s'y prendre ? Et comment un enseignant peut-il aider un élève à aller cherche l'attention de l'interlocuteur ? C'est cela que vient préciser le programme. Le texte n'a pas été pondu pour monsieur et madame Tout-le-Monde, mais bien pour le pédagogue qui doit évaluer un élève de manière à l'aider à progresser.

- Plus loin, Martineau ironise encore : «L'étudiant doit se représenter l'énonciation comme une action langagière destinée à quelqu'un dans une situation de communication particulière et l'énoncé, comme le produit, écrit ou oral, de cette action.» (Traduction: parler, c'est dire des choses. N'est-ce pas, messieurs les pédagogues?)

- Ironie plutôt facile. Je le vois dire à ses élèves « Quand tu parles, dis quelque chose! » Et comment s'y prendrait-il pour amener un élève à dire des choses ? Un enseignant mettra l'élève en situation, lui montrera à produire un écrit ou un message oral. L'enseignant enseignera à l'élève que sa communication s'adresse à quelqu'un, que le destinataire est important et que le message doit en tenir compte. C'est ça qui est indiqué dans le programme. Parler, c'est dire quelque chose : quel simplicisme !

- Son dernier paragraphe est bizarre, non?

- Mets-en ! Ce qu'il y dit «Non seulement les profs doivent-ils composer avec des classes de plus en plus grosses et de plus en plus diversifiées [...], mais en plus, on leur demande de suivre des manuels de pédagogie rédigés par des savants fous!» La première partie de sa phrase pourrait faire l'objet d'un article complet, et n'a absolument aucun rapport avec son propos sur l'écriture du programme.

- Comme journaliste, M. Martineau aurait dû se relire...

- Ce n'est pas à nous de lui dire comment il doit faire son travail. Et je pense que ce n'est pas à lui de critiquer le contenu du programme de formation, exactement comme il ne viendrait à personne l'idée de critiquer un ouvrage d'ingénierie sur la construction des ponts. Le Programme de formation est écrit pour des spécialistes en pédagogie, pas pour les journalistes. Le MELS n'a-t-il pas d'ailleurs publié quelques dépliants pour expliquer aux parents et aux citoyens non pédagogues le contenu du programme ? M. Martineau aurait dû s'en inspirer...

lundi 28 avril 2008

The piano

La musique, ce qu'elle est : respiration. Marée. Longue caresse d'une main de sable.
Christian Bobin

dimanche 27 avril 2008

Marraine et filleule

Aurélie est en visite pour la semaine. C'est l'occasion pour elle de faire connaissance avec Marilise.

Deux liens



La mouture UBUNTU 8.04 est parue depuis quelques jours. Allez, Windowsiens, un petit effort : démarrez votre machine sur ce CD Live et essayez-le. Mais méfiez-vous, il se pourrait que vous aimiez beaucoup.



Charles Fréou a mis sur web un premier groupe d'intérêt francophone Scratch. N'oubliez pas de vous y inscrire si vous avez un certain intérêt pour ce superbe logiciel.

samedi 26 avril 2008

Surprise espagnole

Cyberfolio en Espagne !

Archives nationales

Je ne savais pas que j'étais répertorié à la Bibliothèque nationale du Québec.

vendredi 25 avril 2008

Phun



Un grand merci à Pierre qui m'a fait parvenir ce lien.

Colloque 5

Lors du 5e colloque TIC des RÉCIT de l'Outaouais, j'ai présenté un atelier de deux heures sur Scratch. Pour m'assister, j'avais quatre merveilleux élèves de l'école Saint-Pie X de Papineauville.

Et si, un jour, on passait du magistro-centré au pédo-centré ?

lundi 21 avril 2008

Sentimathalité

Mathématiques et sentiments, un billet écrit le 5 mars dernier par Fabien Besnard du blogue Mathéphysique m'a fait grand bien ce matin.

dimanche 20 avril 2008

Joanisse Awards

Hier soir, Marie et moi étions au traditionnel bal de fin d'année de l'école de danse Joanisse.

Jamais, mais au grand jamais j'aurais pensé un jour danser. Qui plus est, non seulement je danse, mais en plus j'aime ça !

Comment et pourquoi tombe-t-on en amour ? Une réponse claire et universelle est sans doute impossible à trouver. Cependant, après trois ans de cours, j'ai toujours ce même sentiment, fort, aigu et jouissif que « j'apprends ». Je mets entre guillemets, car le verbe apprendre est ici à la frontière du réel et de l'irréel. C'est indescriptible. Comme lorsqu'on assiste à la naissance de notre enfant. Mais ici, c'est une portion de notre cerveau qui prend vie. J'ai eu exactement le même sentiment lorsque, à 32 ans, ne sachant même pas ce que les touches blanches et noires signifiaient, je me suis mis à l'étude du piano. Cela a duré cinq ans, à deux heures par jour, cinq ans d'une quotidienne jouissance intellectuelle et ce, malgré mes énormes difficultés.

Et puis, il y a Marie. Pouvoir l'accueillir sur un plancher de danse. Apprendre à la conduire. Lui lancer des signaux qu'on espère clairs pour qu'elle les capte... et les accepte. Se déplacer en harmonie. La regarder bouger, tourner.

Danser avec notre amoureuse, que peut-on demander de plus à la vie ?


Oh, j'oubliais ! Nous avons reçu un des cinq Joanisse Awards pendant la soirée, soit le trophée du couple s'étant le plus amélioré. Il s'agit d'un socle sur lequel est monté un vieux soulier de danse de Lise, la copropriétaire de l'école.

mardi 15 avril 2008

Sur France Inter

Hier après-midi, l'émission de France Inter La tête au carré avait pour sujet principal «À quoi servent les mathématiques ?» avec Benoit Rittaud et Denis Guedj comme invités.

Vous avez quelques jours seulement pour écouter l'émission archivée.

J'ai été assez décu, m'attendant à avoir au moins quelques réponses. Il s'agissait, semble-t-il, plutôt de ploguer les récents livres des mathématiciens.

Cela a tourné un peu autour de l'école, avec un Guedj plutôt hésitant, et un Rittaud plutôt réservé. Idem pour la distinction garçons-filles, les invités ne voulant pas s'engager dans une polémique. Bref, une entrevue qui manquait de punch. Mais certaines interventions dans les commentaires sur le site valent cependant la peine.

Trois idées que j'ai retenues : 1. Les théorèmes racontent une histoire; 2. Très vite une personne va parler d'elle lorsqu'on initie une conversation autour de la mathématique. 3. Les maths n'ont pas la cote médiatique. Après le parcours scolaire, on n'en entend plus parler. Donc, pour la grande majorité de la population, les mathématiques, ce sont d'abord les mathématiques dites scolaires.

vendredi 11 avril 2008

Technologies et innovation

Un extrait de l'article Plus un pays développe et utilise les nouvelles technologies, plus il est performant et innovant paru dans Le Monde récemment.
[...] les TIC sont devenues indispensables à l'innovation. Parce que ces technologies ont permis de développer des outils de simulation capable de tester des hypothèses, tant en biologie que dans l'automobile ou l'aéronautique. Mais aussi parce qu'elles stimulent la collaboration de chercheurs entre eux et avec les communautés d'utilisateurs.
Au début des années 80, LOGO n'a pas vraiment percé dans nos écoles. Mais il faudrait absolument qu'aujourd'hui, on ne laisse pas passer l'occasion d'enseigner la programmation informatique aux enfants.

Toutes les fois, mais absolument toutes les fois, que je mets les enfants devant Scratch, je les vois innover. Bien sûr, certains ont des idées relativement banales, mais au contact des projets des autres, j'entends des «Hé, ça me donne une idée !» et ils se lancent au clavier pour tenter de la réaliser. Ou encore, ils en suggèrent de nouvelles à l'auteur du projet. Ou encore, ils demandent «Mais comment as-tu fait ça ?» Des enfants intéressés à apprendre, que demander de plus ?

Les enfants pensent. Il me semble qu'en 2008, on pourrait les laisser utiliser l'ordinateur pour les aider à concrétiser leurs pensées, au lieu de simplement leur demander de transcrire leurs textes (déjà couchés sur du papier) dans un texteur !

Il est dans mes convictions que lorsque les enfants passeront du cerveau à l'ordinateur, sans un intermédiaire papier ou autres, le système d'éducation aura muté. Les enseignants aussi...

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