Angelus Silesius
1624-1677
- Pur comme le plus fin des ors, ferme comme un roc,
De part en part limpide comme un cristal; ainsi doit être ton coeur.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.53, Rivages poche n°464)
- Je ne sais pas ce que je suis, je ne suis pas ce que je sais :
Une chose, et pourtant aucune chose, un petit point et un cercle.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.54, Rivages poche n°464)
- Homme, si tu es encore quelque chose, si tu sais quelque chose, si tu aimes et détestes quelque chose,
Crois-moi, tu n'en as pas fini avec ton fardeau.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.59, Rivages poche n°464)
- Je ne crois en nulle mort; je meurs à toute heure
Et chaque fois je n'ai trouvé qu'une vie meilleure.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.61, Rivages poche n°464)
- Rien ne te met en mouvement, tu es toi-même la roue
Qui roule d'elle-même et n'a pas de repos.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard, p.63, Rivages poche n°464)
- Je n'aime qu'une chose et ne sais ce qu'elle est,
Et parce que je l'ignore je l'ai choisie.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.64, Rivages poche n°464)
- Celui qui ne désire, n'a, ne sait, n'aime, ne veut rien,
Il a, désire, et aime encore beaucoup.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.65, Rivages poche n°464)
- L'âme est un cristal et la divinité sa lumière :
Le corps où tu vis est l'écrin de tous deux.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.69, Rivages poche n°464)
- Celui pour qui tout se vaut n'est touché par nulle peine
Même dans le cloaque du plus profond enfer.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.85, Rivages poche n°464)
- Le ciel est en toi et aussi les tortures de l'enfer :
Ce que tu choisis et ce que tu veux, tu l'as partout.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.90, Rivages poche n°464)
- Tu n'aimes pas les hommes et tu fais bien :
C'est l'humanité qu'il faut aimer en l'homme.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.94, Rivages poche n°464)
- Si tu perds la vue à force de regarder le soleil
La faute est dans tes yeux non dans sa grande lumière.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.98, Rivages poche n°464)
- Tu dis : Quitte le temps et rejoins l'éternité ;
Mais y a-t-il une différence entre le temps et l'éternité ?
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.101, Rivages poche n°464)
- Rien ne me semble haut : je suis la plus haute des choses
Car Dieu Lui-même, sans moi, ne compte pour rien à Ses yeux.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.105, Rivages poche n°464)
- Je sais que le rossignol ne trouve rien à redire à l'intonation du coucou ;
Mais toi, si je ne chante pas comme toi, tu te moques de la mienne.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.120, Rivages poche n°464)
- La rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit,
N'a pour elle-même aucun soin, - ne demande pas : Suis-je regardée ?
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.126, Rivages poche n°464)
- Fou l'homme qui boit à une flaque
Et ignore la fontaine qui jaillit dans sa maison !
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.129, Rivages poche n°464)
- Ni le créé ni Dieu ne peuvent te jeter dans l'inquiétude ;
C'est toi-même (ô folie !) qui t'inquiètes des choses.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.139, Rivages poche n°464)
- Homme, si tu veux et n'aimes rien, tu veux et aimes bien ;
Celui qui aime ce qu'il veut n'aime pas ce qu'il faut.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.148, Rivages poche n°464)
- Le monde est l'océan, le marin est l'esprit de Dieu,
Le navire est mon corps, et mon âme la voyageuse qui retourne chez elle.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.150, Rivages poche n°464)
- Le monde ne te tient pas, c'est toi-même le monde
Qui par des liens si forts te retient prisonnier en toi.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.154, Rivages poche n°464)
- Essaie, ma petit colombe : on apprend beaucoup par l'exercice ;
Celui qui ne reste pas assis finit par arriver au but.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.176, Rivages poche n°464)
- Ah ! mon frère, deviens : qu'as-tu à rester fumée, apparence ?
Nous avons essentiellement à devenir un être nouveau.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.181, Rivages poche n°464)
- Le vrai vide est comme un vase splendide
Qui porte du nectar : il a, et ne sait quoi.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.185, Rivages poche n°464)
- Je ne connais que trois jours : hier, aujourd'hui et demain ;
Mais quand hier se cache dans aujourd'hui et maintenant,
Et que demain s'efface, je vis ce jour
Que je vivais en Dieu avant d'être.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.215, Rivages poche n°464)
- J'aime beaucoup la beauté ; mais j'hésite à l'appeler belle
Si je ne la vois pas toujours au milieu des épines.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.226, Rivages poche n°464)
- Le sage ne cherche qu'une chose, et c'est le bien suprême ;
Un fou aspire à mille choses - minuscules.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.247, Rivages poche n°464)
- Ne renonce pas, mon enfant, si seulement tu as une bonne volonté
Ton orage finira par se calmer.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.260, Rivages poche n°464)
- L'âme a deux yeux : l'un regarde le temps
Et l'autre se tourne vers l'éternité.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.261, Rivages poche n°464)
- Ami, si tu es quelque chose, n'en reste pas là :
Il faut sans cesse aller d'une lumière à une autre.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.262, Rivages poche n°464)
- L'homme a trois ennemis : lui-même, Belzébuth et le monde ;
Mais entre eux c'est le premier le plus long à abattre.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.262, Rivages poche n°464)
- Meurs avant de mourir, pour ne pas mourir
Quand tu devras mourir ; sinon tu périras.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.293, Rivages poche n°464)
- Mon meileur ami - mon corps - est mon pire ennemi :
Il me lie, m'entrave même s'il me veut du bien.
Je le hais et je l'aime, et au jour de nos adieux
Je m'arracherai à lui avec joie et avec peine.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.294, Rivages poche n°464)
- Nulle mort n'est plus belle que celle qui donne une vie,
Nulle vie plus noble que celle qui surgit de la mort.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.300, Rivages poche n°464)
- Le cercle est dans le point, le fruit est dans la graine,
Dieu dans le monde : sage est celui qui L'y cherche.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.315, Rivages poche n°464)
- Homme, ne montre pas trop haut et ne tire gloire de rien d'autre :
La plus belle sagesse c'est de ne pas être sage.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.349, Rivages poche n°464)
- Le soleil n'a pas mal quand tu te détournes de lui
Et Dieu non plus quand tu cours à l'abîme.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.351, Rivages poche n°464)
- Tout bien n'est pas bon. Homme, ne te fais pas d'illusions :
Ce qui ne brûle pas de l'huile d'amour est une fausse lumière.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.365, Rivages poche n°464)
- L'homme riche qui parle sans cesse de sa misère,
N'hésite pas à le croire : la vérité - c'est qu'il ne ment pas.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.376, Rivages poche n°464)
- Partager donne la paix ; c'est de la propriété seule
Que naissent tous les maux, toutes les persécutions, les guerres et les luttes.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.383, Rivages poche n°464)
- Le plus court chemin vers Dieu passe par la porte de l'amour ;
Le chemin de la science t'y mène très lentement.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.417, Rivages poche n°464)
- Le sage qui s'est porté au-dessus de lui-même
Repose quand il court, agit quand il contemple.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.428, Rivages poche n°464)
- Fou l'homme qui embrasse un nuage !
Fou, toi qui te fais joie de vaine gloire !
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.448, Rivages poche n°464)
- Le sage est ce qu'il a. Si tu ne veux pas perdre
La petite perle du ciel, tu dois l'être toi-même.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.484, Rivages poche n°464)
- On n'apprécie rien si on ne le contemple pas ; ce qui manque au monde c'est la contemplation.
(Le Voyageur chérubinique, trad. Maël Renouard
, p.497, Rivages poche n°464)