Paul Guth
1910-1997
  1. Le destin doit être un masochiste, pour se priver du tribut de gratitude dont je l'aurais comblé s'il m'avait favorisé, parfois, d'un cadeau que je ne méritais pas.
    (La chance, p.15, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  2. La fortune des riches est faite de la misère des pauvres. La chance des heureux est prise sur la malchance des misérables.
    (La chance, p.21, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  3. Nous sommes fatigués et humiliés de vivre dans un univers régi par des lois mathématiques. Nous souhaitons que le destin fasse, pour nous, une entorse à ses calculs, qu'il nous « pistonne » hors du tableau d'avancement normal. Qu'il nous favorise par de l'inexplicable, parce que c'était lui, parce que c'était elle, comme dans les coups de foudre de l'amour.
    (La chance, p.31, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  4. Croire en notre chance c'est nous imaginer que nous avons un charme invincible, un prix inestimable et que nous faisons au destin un grand honneur en acceptant ses dons.
    (La chance, p.32, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  5. La chance est la forme laïque du miracle.
    (La chance, p.33, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  6. La chance est dans l'oxygène. Pour avoir de la chance respirez à fond. En réoxygénant votre sang vous l'enrichirez.
    (La chance, p.40, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  7. Souvent nous refusons de reconnaître une chance parce qu'à sa place nous attendions ce qui était, en fait, la chance d'un autre.
    (La chance, p.55, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  8. « Veinard, va ! » dit-on en nous tapant dans le dos. Comme si nous étions complices d'une canaillerie.
    (La chance, p.63, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  9. Nous croyons parfois que la chance nous sourit. C'est à un autre qu'elle souriait, comme ces femmes de rêve que l'on rencontre dans la rue et que, dans notre dos, un autre attendait.
    (La chance, p.65, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  10. «Les événements actuels ont, avec les précédents, une liaison fondée sur le principe évident qu'une chose ne peut pas commencer d'être sans une cause qui la produit. Une intelligence qui, pour un instant donné, connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée et la situation respective des êtres qui la composent, embrasserait dans la même formule les mouvements des plus grands corps de l'Univers et ceux du plus léger atome, rien ne serait incertain pour elle et l'avenir, comme le passé, serait présent à ses yeux.»
    LAPLACE

    Il n'y aurait donc pas de hasard. Comment expliquer alors cette joie qui annonçait au mathématicien et philosophe Descartes qu'il allait gagner au jeu ?
    Descartes vivait au XVIIe siècle. Sa pensée, encore imprégnée du christianisme, était à la charnière du Moyen Âge et des temps modernes. Elle gardait sa part à l'inconnaissable. Laplace, savant du XVIIIe et du début du XIXe, appartenait à l'âge où la science, grisée d'elle-même, prétendait tout expliquer.
    D'ailleurs, pourquoi l'allégresse de Descartes, dans la science, ne serait-elle pas la récompense de son obéissance aux lois ? L'esclave obéit en grognant. L'homme libre exulte. Il retrouve sa liberté en acceptant les règles.

    (La chance, p.75, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  11. La chance est femme, et enfant de Bohême. Elle veut aimer chacun de nous au moment qu'elle choisit, pour des raisons connues d'elle seule, en accord avec d'inexplicables lois de notre nature que nous ne découvrirons qu'en présence de Dieu, dans le flash éblouissant du Jugement dernier, et qu'en attendant elle s'amuse à nous entendre expliquer.
    (La chance, p.88, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )
     
  12. « Le miracle, c'est qu'il n'y ait pas que des miracles », disait le mathématicien Henri Poincaré. Le miracle, c'est aussi qu'il n'y ait pas que de la chance, qu'il y ait encore la malchance, l'achance, l'effort, le mérite. Mais la chance n'est un miracle qu'en apparence, pour contenter notre soif de merveilleux. Elle obéit en fait au calcul des probabilités et à des lois psychologiques et cosmiques encore plus profondes. C'est cela qui est un miracle, dirait Henri Poincaré.
    (La chance, p.90, Hachette (Coll. Notes et maximes), 1963 )