Thierry Crouzet

  1. L'humanité forme un petit monde où nous nous connaissons indirectement presque tous.
    (Le peuple des connecteurs, p.15, Bourin éditeur, 2006)
     
  2. De plus en plus souvent, en défendant la « pensée réseau » et ses implications, je me suis heurté à la « pensée hiérarchique ». J'ai commencé par me demander si je ne pensais pas de travers, puis j'ai compris que mes conflits à répétitions avaient une origine plus profonde. Ils témoignaient du divorce entre deux attitudes irréconciliables : d'un côté l'idée de réseau comme principe d'organisation sociale, de l'autre le refus de croire que nous pouvons nous auto-organiser en l'absence de chef.
    (Le peuple des connecteurs, p.19, Bourin éditeur, 2006)
     
  3. Dans un monde global hautement interconnecté, il faut être irresponsable pour exercer le pouvoir. Un ordinateur imbécile, qui prendrait des décisions au hasard, ne commettrait pas plus d'erreurs qu'un politique averti.
    (Le peuple des connecteurs, p.25, Bourin éditeur, 2006)
     
  4. Être conscient d'appartenir à une structure émergente n'empêche pas cette structure de se former. Réciproquement, nous pouvons collaborer à une structure émergente sans en prendre conscience.
    (Le peuple des connecteurs, p.45, Bourin éditeur, 2006)
     
  5. Après le temps des rois est venu celui des individus. Du point de vue des connecteurs, un président élu au suffrage universel ne diffère guère d'un roi, sinon qu'une assemblée législative pondère sa toute-puissance. Ce pouvoir à deux têtes peut être considéré comme une oligarchie, plusieurs personnes exerçant ensemble l'autorité royale, ou comme un jeu de pouvoirs et de contre-pouvoirs qui se neutralisent. Aucune de ces deux perspectives n'est réjouissante. La seconde, synonyme d'impuissance, est caractéristique de la plupart des démocraties.
    (Le peuple des connecteurs, p.48, Bourin éditeur, 2006)
     
  6. Essayer de comprendre Internet est devenu aussi ardu que de comprendre un organisme vivant.
    (Le peuple des connecteurs, p.66, Bourin éditeur, 2006)
     
  7. Nous avons non seulement de droit à la différence mais le devoir de différence.
    Les sociétés centralisées reposent sur des soldats formatés, les seuls individus aptes à répondre à des ordres. Les sociétés décentralisées se construisent grâce à des rebelles généralistes. Spontanément, ils créent des réseaux sociaux où chaque lien vibre à sa fréquence propre comme autant de notes de musique. De cette cacophonie émerge, par auto-organisation, un accord parfait, jamais un ton monocorde. Le passage de la centralisation à la décentralisation est, pour la société, comme le passage du contrepoint à la polyphonie en musique. Plutôt qu'une voix unique ui se fait écho à elle-même, de multiples lignes mélodiques s'entremêlent et se répondent.

    (Le peuple des connecteurs, p.93, Bourin éditeur, 2006)
     
  8. Je suis toujours surpris de rencontrer des jeunes gens de 20 ans qui ne savent pas programmer. Je crois qu'il leur manque une qualité essentielle pour percevoir la merveilleuse simplicité du monde. L'informatique devrait être une matière fondamentale au même titre que les langues ou les mathématiques. Nous devrions tous savoir écrire, compter et programmer, sinon nous ne pouvons plus comprendre le monde et nous y épanouir.
    - Pour moi, écrit le mathématicien Gregory Chaitin, vous ne comprenez quelque chose que si vous êtes capable de le programmer. (Vous, et personne d'autre !) Autrement, vous ne le comprenez pas vraiment, vous pensez seulement que vous le comprenez.

    (Le peuple des connecteurs, p.98, Bourin éditeur, 2006)
     
  9. Comprendre l'origine d'une guerre, c'est retrouver le minuscule événement, perdu parmi tant d'autres, qui précipite l'état critique vers un état plus stable.
    (Le peuple des connecteurs, p.124, Bourin éditeur, 2006)
     
  10. Nous sommes tous un grain de sable. Nos actions dépendent de la couleur de la zone où nous nous agitons.
    (Le peuple des connecteurs, p.129, Bourin éditeur, 2006)
     
  11. Le réseau est notre Sécurité sociale.
    (Le peuple des connecteurs, p.138, Bourin éditeur, 2006)
     
  12. Expliquer comment fonctionne une intelligence ne rend pas ses créations moins merveilleuses. L'ambition des connecteurs n'est pas de désenchanter le monde mais seulement, en le comprenant mieux, d'y vivre avec moins de préjugés.
    (Le peuple des connecteurs, p.150, Bourin éditeur, 2006)
     
  13. Mieux nous communiquons, plus nous nous libérons de l'influence des chefs. Leur force et leur intelligence ne peuvent plus lutter contre celles de l'ensemble, surtout quand l'ensemble rassemble des millions d'hommes qui dialoguent à la vitesse de la lumière.
    (Le peuple des connecteurs, p.155, Bourin éditeur, 2006)
     
  14. Notre cerveau a le don de connecter des faits. Parfois ces connexions conduisent à des découvertes scientifiques, parfois à des oeuvres d'art, le plus souvent à des affabulations.
    (Le peuple des connecteurs, p.163, Bourin éditeur, 2006)
     
  15. L'hypothèse de Wolfram, que le monde est bâti à partir de quelques lignes de code, n'est pas plus incroyable que celles qui exigent une divinité. Elle est même beaucoup plus plausible quand on observe les formes admirables créées par les automates cellulaires.
    (Le peuple des connecteurs, p.193, Bourin éditeur, 2006)
     
  16. Entre cinéma et littérature, théâtre d'improvisation et opéra, [le jeu de rôle] se veut un art total comme le rêvait Wagner. Un art où l'artiste et le spectateur créent en même temps, dialoguent continûment, inventent sans cesse des situations inattendues. Dans certaines circonstances, il est vrai exceptionnelles, le jeu de rôle procure des expériences esthétiques bouleversantes.
    (Le peuple des connecteurs, p.210, Bourin éditeur, 2006)
     
  17. L'approche évolutionniste semble la seule adaptée à la résolution de problèmes complexes que notre entendement n'est pas capable d'englober d'un seul élan. Nous ne programmerons pas les machines intelligentes du futur, nous les laisserons évoluer dans le cyberespace.
    (Le peuple des connecteurs, p.235, Bourin éditeur, 2006)
     
  18. [...] le hacker n'est pas qu'un hors-la-loi, c'est aussi un fou de technologie qui sait que de l'effervescence propre à tout bouillonnement culturel peut jaillir de la nouveauté. Envoyer un virus sur Internet revient à augmenter la température sous la marmite. Le hacker, ce générateur de chaos dans le monde hiérarchisé et centralisé - dorénavant représenté par les grandes corporations - est le véritable novateur de notre temps.
    (Le peuple des connecteurs, p.240, Bourin éditeur, 2006)
     
  19. Pour nous, il n'y a pas d'autre méthode créatrice que le hasard. Le talent d'un artiste, d'un scientifique ou d'un ingénieur est de saisir les créations hasardeuses, de les organiser, de les relier. Le hasard est un mécanisme pour créer de la nouveauté. Il crée aussi beaucoup de déchets, mais l'évolution a mis en place des processus pour les trier : l'intelligence serait cette aptitude à voir ce qui peut être utile dans la myriade des créations inutiles. À un plus bas niveau, l'émergence serait un facteur de tri des créations hasardeuses.
    (Le peuple des connecteurs, p.250, Bourin éditeur, 2006)
     
  20. Le Web est un métabolisme en cours d'évolution. Il est comme le cerveau des enfants, il noue sans cesse de nouvelles relations. Certaines ne servent à rien, d'autres ne mènent nulle part, se cassent, d'autres encore se trouvent renforcées, une intelligence et une conscience finiront peut-être par émerger de ce processus sans que nous en soyons nécessairement avertis.
    (Le peuple des connecteurs, p.256, Bourin éditeur, 2006)
     
  21. La complexité est inhérente à l'existence puisqu'elle découle de la simplicité.
    (Le peuple des connecteurs, p.272, Bourin éditeur, 2006)