Marguerite Duras
1914-1996
  1. On ne trouve pas la solitude, on la fait.
    (Écrire, p.17, Folio no 2754)
     
  2. Le doute, c'est écrire.
    (Écrire, p.22, Folio no 2754)
     
  3. Écrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit.
    (Écrire, p.28, Folio no 2754)
     
  4. Être seule avec le livre non encore écrit, c'est être encore dans le premier sommeil de l'humanité.
    (Écrire, p.31, Folio no 2754)
     
  5. Il y a le suicide dans la solitude d'un écrivain.
    (Écrire, p.31, Folio no 2754)
     
  6. La solitude c'est ce sans quoi on ne fait rien. Ce sans quoi on ne regarde plus rien. C'est une façon de penser, de raisonner, mais avec la seule pensée quotidienne.
    (Écrire, p.32, Folio no 2754)
     
  7. L'insulte, c'est aussi fort que l'écriture.
    (Écrire, p.37, Folio no 2754)
     
  8. Moi je ressemble à tout le monde. Je crois que jamais personne ne s'est retourné sur moi dans la rue. Je suis la banalité.
    (Écrire, p.37, Folio no 2754)
     
  9. La solitude est toujours accompagnée de folie.
    (Écrire, p.44, Folio no 2754)
     
  10. L'écrit ça arrive comme le vent, c'est nu, c'est de l'encre, c'est l'écrit, et ça passe comme rien d'autre ne passe dans la vie, rien de plus, sauf elle, la vie.
    (Écrire, p.53, Folio no 2754)
     
  11. La mort baptise aussi.
    (Écrire, p.64, Folio no 2754)
     
  12. Il y aurait une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture de mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Égarés. Là, écrits. Et quittés aussitôt.
    (Écrire, p.71, Folio no 2754)
     
  13. Il y a souvent des récits et très peu souvent de l'écriture.
    (Écrire, p.79, Folio no 2754)
     
  14. Nous ne nous aimons pas et ... [...] Je ne savais pas que ça pouvait être aussi effrayant de ne pas s'aimer.
    (Suzanna Andler, p.44, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  15. [...] qu'elle soit bonne ou mauvaise, ta vie, il n'y a pas deux façons de quitter sa mère.
    (Des journées dans les arbres, p.92, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  16. On croit que, lorsqu'une chose finit, une autre recommence tout de suite. Non. Entre les deux, c'est la pagaille.
    (Des journées dans les arbres, p.96, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  17. [Le personnage qui réplique a 72 ans]
    [...] c'est une merveille, à mon âge, d'ignorer l'avenir.

    (Des journées dans les arbres, p.96, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  18. J'ai commencé tôt à faire de moins en moins ce qui m'aurait plu, et puis à ne plus le faire du tout. C'est ce qu'on appelle une existence remplie.
    (Des journées dans les arbres, p.100, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  19. On est tous pareils, tous des gens d'argent. Il suffit de commencer à en gagner.
    (Des journées dans les arbres, p.105, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  20. Il reste toujours quelque chose de l'enfance, toujours...
    (Des journées dans les arbres, p.107, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  21. C'est bien la même chose, en fin de compte, toutes ces histoires : travailler..., pas travailler... et puis on s'embarque sur ce bateau-là... Ce qu'il faut ? Ne rien regretter, c'est tout.
    (Des journées dans les arbres, p.127, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  22. Est jeune (geste indiquant un jeune guerrier), comme ça, mais dans la tête est antique.
    (Yes, peut-être, p.158, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  23. [En désignant un homme qui vient de chanter un hymne militaire]
    C'est un hymmilitaire.

    (Yes, peut-être, p.159, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  24. Le bruit de la mer tout à coup, très fort et qui envahit la salle.
    B : On entend quoi ?
    A, crie : L'océantique.

    (Yes, peut-être, p.163, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  25. [Les deux personnages féminins parlent de la guerre. On voit ici le langage utilisé par M. Duras dans cette pièce située après une grande catastrophe nucléaire. -GGJ]
    A : Disaient :" Uber Alles Enfants d'Patrie " (dit comme "enfants d'putain"). C'était le signal. Fonçaient.
    B : Où ?
    A : Dans tous les sens. Par là par là par là par là. Allaient. Prenaient.
    B : Quoi ?
    A : Le sol ?
    B, étonnée : Le sol comment ?
    A : Le sol aux autres.
    B : Cest quoi le sol-aux-autres ?
    A : C'est le sol.
    B, très étonnée : Comment, ils prennent le sol ?
    A : Disaient : " Ça qu'on est dessus c'est à nous. "
    [...]
    B : Les enfants de la patrie et la patrie sont morts. Morts.
    A : On est enfants de quoi maintenant ici ?
    B : Enfants de rien.

    (Yes, peut-être, p.173, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  26. Je connais quelqu'un, c'était pareil, c'était comme ça, elle avait une maison mais elle ne pouvait pas rester dedans. La maison était pleine de trous et elle, elle coulait par les trous. Alors on l'a mise dans une maison sans trous, avec des barres de fer à la place des trous, alors elle reste entièrement maintenant.
    (Le Shaga, p.200, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  27. Quand les oiseaux sont décidés à appartenir, c'est épouvantable, il n'y a pas plus appartenant que les oiseaux.
    (Le Shaga, p.226, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  28. Je comprends mais je ne vois pas pourquoi je comprends. Je comprends ce que vous dites, mais ce que vous voulez dire en disant ce que vous dites, ça je ne le comprends pas.
    (Le Shaga, p.228, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  29. La confirmation de la tristesse est une consolation.
    (Un homme est venu me voir, p.264, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  30. [La folie ou la mort] sont les deux termes familiers entre lesquels l'ignorance oscille d'habitude...
    (Un homme est venu me voir, p.270, in Théâtre II, Gallimard nrf 1968)
     
  31. Il n'y a rien de plus dégoûtant qu'un bijou. Ça ne sert à rien, à rien. Et ceux qui les portent n'en ont pas besoin, moins besoin que n'importe qui.
    (Un barrage contre le Pacifique, p.118, Livre de Poche n° 2443)
     
  32. Elle avait aimé démesurément la vie et c'était son espérance infatigable, incurable, qui en avait fait ce qu'elle était devenue, une désespérée de l'espoir même. Cet espoir l'avait usée, détruite, nudifiée à ce point, que son sommeil qui l'en reposait, même la mort, semblait-il, ne pouvait plus le dépasser.
    (Un barrage contre le Pacifique, p.124, Livre de Poche n° 2443)
     
  33. [...] la connaissance qu'a un seul homme de la faute de cent autres ne lui sert à rien.
    (Un barrage contre le Pacifique, p.257, Livre de Poche n° 2443)
     
  34. [...] pour que vous vous intéressiez à moi, il faut que je vous parle de vous.
    (Un barrage contre le Pacifique, p.258, Livre de Poche n° 2443)