Nicolas Charles de Nugent
1806 - 1881
  1. Le succès se prend pour la gloire, et il n'en est que la contrefaçon.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  2. On devrait rester droit, ne fût-ce que pour éviter la peine et la difficulté de se redresser.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  3. Le génie qui cherche et courtise la popularité, c'est l'aigle qui s'abaisse au rôle du papillon : il est né pour affronter la tempête et non pour faire bercer son aile aux souffles du printemps.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  4. Le coeur des femmes est sujet à des migraines comme leur tête, et le coeur des hommes est sujet aux rhumatismes comme leurs jambes.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  5. Loger l'esprit chez la raison et l'amour chez l'hymen, c'est mettre chaque chose à sa vraie place ; c'est juste et c'est heureux ; il est tout simple que ce soit rare.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  6. Les moeurs démocratiques produisent et développent l'individualisme, qui nous expose aux dangers que courrait une ruche sans reine : chaque abeille songe à elle et aucune ne songe à l'essaim.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  7. L'ivresse du coeur est plus excusable et plus involontaire que l'ivresse des festins, parce qu'il n'est pas aussi aisé de mettre de la raison dans sa tendresse que de mettre de l'eau dans son vin.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  8. La plupart des publicistes sont des prédicateurs dont les sermons n'émeuvent et ne persuadent que les gens de leur paroisse.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  9. Les muets sont une société préférable à celle des sots, et dans le monde on aime mieux l'homme qui dort que l'homme qui bâille.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  10. Chacun cherche à s'élever, et cependant chacun sait que c'est au pied et non au sommet de la montagne qu'on se trouve à l'abri des coups de vent et des coups de soleil.
    (Pensées vagabondes, p. 82 in Revue de Bretagne et de Vendée, 6e année, t.1, Nantes, 1862)
     
  11. La société humaine ressemble à un champ de blé : les esprits et les épis les plus vides sont ceux qui s'y tiennent la tête la plus haute.
    (Pensées, p. 73 in Revue de Bretagne et de Vendée, 5e année, t.10, Nantes, 1861)
     
  12. Un grand nom accompagné d'un petit mérite ressemble à l'effigie royale d'un souverain sur le cuivre d'un centime.
    (Pensées, p. 73 in Revue de Bretagne et de Vendée, 5e année, t.10, Nantes, 1861)
     
  13. L'extérieur d'un homme , ses traits et ses manières, sont à son esprit ce que la reliure est à un livre. Ah ! que de mauvais livres bien reliés !
    (Pensées, p. 73 in Revue de Bretagne et de Vendée, 5e année, t.10, Nantes, 1861)
     
  14. L'ambitieux se fait piédestal pour devenir statue.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  15. Les contes de fées parlent souvent de pièces d'or qui, précieusement serrées le soir, se trouvent transformées le lendemain maint en morceaux d'ardoises ou en feuilles de chêne : c'est l'histoire de nos projets et de nos espérances.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  16. Une seule fois, au commencement du monde, le limon a été fait homme : mais, depuis, combien de fois l'homme s'est-il fait limon ?
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  17. Louez la justice devant des magistrats, et ils saluent ; vantez le patriotisme devant des fonctionnaires publics, et ils s'inclinent ; exaltez le dévouement devant des chambellans, et ils font la révérence : tous ces dignes personnages ressemblent à des marguilliers, qui prennent pour eux l'encens offert au Christ placé au-dessus de leur banc d'oeuvre.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  18. En fait de louanges comme en fait d'aumônes, on aime surtout à donner aux gens qui ne demandent rien.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  19. Chaque siècle travaille à la refonte des idées comme à la refonte des monnaies. On parle beaucoup d'idées nouvelles, de sentiments nouveaux, et de nouveaux systèmes ; mais sous ce nom on ne met guère en circulation que de vieilles passions et de vieilles folies, comme ce qu'on appelle monnaie est un vieux cuivre dont on n'a changé que l'exergue et l'effigie.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  20. Dans les événements de ce monde, les hommes jouent le rôle des chiffres dans une table d'arithmétique ; les plus puissants ne sont pas ceux qui ont le plus de valeur par eux-mêmes, mais ceux qui comptent le plus de zéros derrière eux.
    (Pensées diverses, p. 491 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  21. L'éducation de nos pères s'efforçait d'enseigner le renoncement à soi-même, l'esprit de sacrifice et l'humilité, vertus difficiles que les leçons les plus constantes et les exemples les plus frappants ne parvenaient pas toujours à graver dans les coeurs. L'éducation moderne tend à tâche de développer l'amour de soi et l'orgueil... comme si cela avait besoin de s'apprendre !
    (Pensées diverses, p. 492 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  22. La violence peut lier, les bienfaits seuls savent attacher.
    (Pensées diverses, p. 492 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  23. Pour corriger, il faut être juste et habile ; pour punir, il suffit d'être fort. De là, dans tous les siècles et tous les pays, tant de punitions qui ne sont ni justes ni habiles, et ne corrigent pas du tout.
    (Pensées diverses, p. 492 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  24. Nos amis nous offrent si volontiers de nous prêter de l'argent lorsque nous n'en avons aucun besoin que cela fait compensation avec leur refus quand la nécessité nous pousse à recourir à eux.
    (Pensées diverses, p. 492 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  25. L'oiseau sillonne les aires comme un navire et rencontre la cime des arbres où il peut s'arrêter et replier son aile fatiguée : le navire vole sur les flots comme l'oiseau dans l'espace et découvre des ports où il va jeter l'ancre, sécher sa voile, et réparer ses agrès. Plus rapide que l'oiseau, plus téméraire que le navire, notre âme s'élance dans l'infini, s'embarque sur l'Océan des passions, et ne trouve ni rameaux verts pour se reposer, ni havres où elle soit à l'abri des tempêtes.
    (Pensées diverses, p. 492 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  26. Interroger les profondeurs du coeur humain, c'est ressembler aux plongeurs qui pénètrent dans les abîmes de l'Océan : on est plus effrayé des monstres qu'on y découvre qu'enthousiasmé des perles qu'on peut y recueillir.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  27. On a comparé le bonheur tantôt à un diamant qui étincelle, tantôt à une fleur dont les parfums enivrent ; mieux eût valu le comparer à la mousse qui ne saurait croître qu'à l'ombre des sentiers battus.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  28. Le calme de la solitude apaise mille désirs, cicatrise mille blessures, adoucit mille amertumes, et, comme aux jours de l'âge d'or, il est encore vrai qu'au désert les arbres et les rochers distillent le miel.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  29. La présomption vient de ce qu'on ne connaît pas, et l'humilité de ce qu'on ne connaît pas les autres.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  30. Ce n'est pas merveille si en vieillissant nous devenons d'amers censeurs de la jeunesse : elle a envers nous tous les torts d'une maîtresse qui nous a quittés.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  31. La pensée de ce que les hommes pourraient être est seule capable de dédommager un peu de ce qu'ils sont.
    (Philosophie du coin du feu, p. 23 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  32. La faiblesse humaine n'a d'égal que l'orgueil humain : nous sommes des nains enivrés de rêves de géants.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  33. La subtilité est la fausse monnaie de la logique, la débauche est la fausse monnaie de la volupté, la violence est la fausse monnaie de la force.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  34. Les réputations basées sur la sottise du public sont des statues d'argile sur un piédestal de granit.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  35. Anéantissez le christianisme, et entre la civilisation et la barbarie il n'y aura plus d'autre différence que celle qui distingue une corruption polie d'une corruption brutale.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  36. On ne cherche jamais Dieu en vain, et, même quand on ne le découvre pas d'abord, on rencontre toujours quelques vertus sur la route.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  37. Avoir de l'esprit et faire de l'esprit sont deux choses fort différentes : les gens qui en ont beaucoup n'en font guère, et ceux qui s'évertuent à en faire en ont peu ou n'en ont pas.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  38. Le sens commun a sans doute été ainsi nommé parce que de toutes les raretés il est la plus rare.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  39. Vendre le manoir paternel, c'est abjurer de saintes traditions et de douces vertus ; c'est perdre en un jour l'influence acquise par vingt générations ; c'est rompre les habitudes qui donnaient l'amitié des égaux et le respect des subordonnés ; c'est se déraciner du sol. Des lois, vraiment politiques parce qu'elles seraient vraiment morales, apporteraient quelque obstacle à ce trafic des pénates : malheur au pays où, loin de s'opposer à ces ventes, la loi les facilite toujours et souvent les rend obligatoires.
    (Philosophie du coin du feu, p. 24 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  40. Si l'homme était assez droit et assez ferme pour ne vouloir jamais s'élever que par des moyens honorables, l'ambition serait une vertu plutôt qu'un vice.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  41. Il faut se séparer assez du monde pour le juger avec calme, et pas assez pour ne plus s'intéresser à ce qui s'y passe : la retraite doit être un asile et non un tombeau.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  42. Souvent les esprits les plus fins se laissent prendre à une louange grossière, comme les oiseaux les plus légers à une glu épaisse.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  43. L'espérance ressemble au médecin qui nous donne plus de bonnes paroles que de santé, et le souvenir à l'avocat qui se charge de mentir pour excuser nos fautes.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  44. Les prospérités rapides et les richesses inespérées sont, pour le coeur de l'homme, ce que les crues subites sont pour le cours d'un fleuve : elles y amènent le trouble et la fange.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  45. Nous rions des nègres qui troquent de l'or contre des verroteries, et nous livrons notre coeur en échange des sourires d'une coquette...
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  46. Chacun prétend mériter le bonheur, et personne ne prétend le posséder : on se dit juste ou plus habile, plus savant ou plus vertueux que son voisin, mais on n'a pas le bon esprit de se croire plus heureux que lui.
    (Philosophie du coin du feu, p. 25 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  47. Il en est de la solitude comme d'un miroir : on s'y contemple plutôt pour s'admirer que pour se connaître.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  48. La poésie est une fleur que les abeilles courtisent pour en extraire le miel, et les chenilles pour la salir.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  49. La lecture de l'histoire du temps passé nous réconcilie un peu avec le temps présent, comme la laideur d'autrui nous aide à nous consoler de la nôtre.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  50. Les dévouements qui n'ont jamais cherché à savoir ce que c'était que la récompense, sont les seuls qui ne sachent pas ce que c'est que la lassitude.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  51. L'esprit est au bon sens ce que l'amour est au mariage, un ennemi plutôt qu'un frère.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  52. L'histoire de l'enfant qui jette les hauts cris quand on se borne à lui montrer les verges, qet qui se tait quand on les lui fait sentir, est l'histoire de plus d'un peuple.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  53. Les écrits dangereux ne sont pas ceux où l'immortalité se montre, mais ceux où elle se cache.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  54. L'avare a toutes les souffrances du pauvre et pas une de ses joies.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  55. La paresse est le poison de la vie, et le loisir en est le charme ; la paresse nous interdit l'accomplissement de nos devoirs, et le loisir nous laisse le choix de nos travaux.
    (Philosophie du coin du feu, p. 26 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  56. L'aigle cherche la solitude parce qu'il dédaigne tout ; le hibou s'y réfugie parce que tout le repousse.
    (Philosophie du coin du feu, p. 27 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  57. Les critiques traitent la poésie comme des chimistes traiteraient une coupe de nectar, et aiment mieux la décomposer que de s'y enivrer.
    (Philosophie du coin du feu, p. 27 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  58. Préférer la philosophie humaine à la religion révélée, c'est penser que, pour éclairer et vivifier l'univers, la lumière factice sortie des ateliers d'un lampiste vaut mieux que l'astre échappé des mains de Dieu.
    (Philosophie du coin du feu, p. 27 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  59. Dans les pays où règne le protestantisme, l'homme qui fait l'aumône et l'homme qui la demande sont également passibles d'une peine ; la charité y est un délit aussi bien que la misère : cela suffit pour caractériser une secte.
    (Philosophie du coin du feu, p. 27 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  60. Une antique et haute pyramide était une des merveilles de l'univers ; elle avait traversé les siècles et défait les tempêtes : des magicienc à parole puissante vinrent s'adresser aux blocs dont était construit ce noble édifice et leur prêcher l'égalité de leur nature et de leurs droits : « N'étaient-ils pas tous sortis des flancs des mêmes rochers ? Pourquoi ne seraient-ils pas tous au même niveau ? Pourquoi la base et les rangs intermédiaires permettraient-ils au sommet de peser éternellement sur eux ? » Aussitôt chaque pierre s'agita, brisa les liens qui l'enchaînaient à sa place, et toutes entreprirent de monter : un long et retentissant écroulement couvrit le sol de débris informes qui purent se vanter d'une parfaite égalité entre eux, mais il n'y avait plus de pyramide. Cette falbe sera-t-elle l'histoire de la société moderne ?
    (Philosophie du coin du feu, p. 27 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  61. Il en est de la mer comme de l'histoire, il faut y faire route la sonde à la main, car, à ne regarder que la surface des flots et à ne voir que les événements et leurs dates, on ne connaît ni la mer ni l'histoire.
    (Philosophie des voyages, p. 562 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  62. Est-ce pour plaire aux oies que les journaux quotidiens ont une si ample provision de canards ?
    (Philosophie des voyages, p. 562 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  63. La rose de Bengale est sans épines mais sans parfum ; c'est l'image de femmes qui ont de la douceur et de la beauté sans un grain d'esprit.
    (Philosophie des voyages, p. 562 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  64. Pour arriver à de curieuses découvertes, ne faisons pas le tour du globe terrestre ; faisons seulement le tour de nous-mêmes.
    (Philosophie des voyages, p. 562 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  65. On trouve aux Indes des hommes qui risquent leur vie pour aller chercher quelques perles au fond de la mer : où trouve-t-on des hommes qui dérobent une heure à leurs travaux où à leurs plaisirs pour chercher quelques vérités au fond de leur conscience ?
    (Philosophie des voyages, p. 563 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  66. La fumée des locomotives s'évapore en s'élevant : hélas ! que de réputations ressemblent à cette fumée !
    (Philosophie des voyages, p. 563 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  67. Le travail et la douleur ouvrent les routes par lesquelles passe la gloire.
    (Philosophie des voyages, p. 566 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  68. S'associer pour voyager, c'est presque s'épouser ; aussi est-il ordinaire qu'on parle dans les sentiments de l'union la plus parfaite, et qu'on soit brouillés avant d'avoir atteint le terme de sa course.
    (Philosophie des voyages, p. 566 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  69. Les grammairiens et les critiques remplissent, dans la littérature, le rôle des maîtres des cérémonies dans un palais.
    (Philosophie des voyages, p. 566 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  70. La gloire est une maîtresse impérieuse, jalouse et souvent infidèle ; l'ambition est une épouse tracassière, chagrine et trompeuse. Heureux qui ne poursuit pas la première et n'est pas enchaîné à la seconde !
    (Philosophie des voyages, p. 567 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  71. En tout pays il est d'usage que les hommes les plus graves ne soient pas les moins sots, de même que les vases les mieux dorés ne sont pas les moins vides.
    (Philosophie des voyages, p. 567 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  72. Les gens de lettres ont un profond dédain pour les hommes qui ont moins d'esprit qu'eux, et une haine encore plus profonde pour ceux qui en ont davantage.
    (Philosophie des voyages, p. 567 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  73. Le malheur des fonctions publiques, c'est qu'au lieu de vivre avec des égaux on est sans cesse en rapport tantôt avec des supérieurs, tantôt avec des subordonnés ; on s'habitue à flatter les uns, à être flatté par les autres, et on devient à la fois incapable de dire la vérité et incapable de l'entendre.
    (Philosophie des voyages, p. 567 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  74. On fait preuve d'esprit en paraissant savoir ce qu'on ignore, et preuve de jugement en paraissant ignorer ce qu'on sait.
    (Philosophie des voyages, p. 568 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  75. Le silence et la rêverie s'aiment, se cherchent et détestent tout ce qui trouble leur tête-à-tête. Ils ont tant de choses à se dire !
    (Philosophie des voyages, p. 568 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  76. Notre coeur, si étroit pour la joie, s'élargit indéfiniment quand il s'agit d'y donner place aux douleurs. Il n'est pas vrai qu'un chagrin chasse l'autre, il ne fait jamais que se mettre à côté.
    (Philosophie des voyages, p. 568 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  77. Pour les coeurs droits et les esprits juste, il en est de la haine comme de l'affection : ils la placent bien.
    (Philosophie des voyages, p. 569 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  78. L'homme qui en vieillissant n'a pris que des années, et celui qui en faisant des dettes n'a perdu que sa fortune, doivent s'estimer bien heureux.
    (Philosophie des voyages, p. 569 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  79. Les pensées de quelques philosophes ressemblent aux montagnes d'Écosse, qui ne nous paraissent sublimes que parce que nous les apercevons confusément à travers les brouillards dont elles s'entourent.
    (Philosophie des voyages, p. 569 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  80. Nous sommes moins avares de notre amitié que de notre estime, par la raison qu'on a plus de plaisir à faire des cadeaux qu'à payer ses dettes.
    (Philosophie des voyages, p. 569 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  81. La plus heureuse philosophie sur notre route en ce monde, que cette route doive être courte ou longue, est de prendre le temps comme il vient, le chemin comme il est, et les hommes... comme ils ne sont pas.
    (Philosophie des voyages, p. 570 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  82. L'esprit militaire accomplit tous les jours un tour de force dans lequel échouent les philosophes et les prédicateurs, il obtient que des milliers d'hommes fassent passer mille choses avant le soin de la conservation de la vie.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 265 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  83. On accuse le tien et le mien d'être la source de toutes les guerres : C'est là une contre-vérité accréditée par des sophistes et des rhéteurs. Le tien et le mien sont la cause et la sauvegarde de la paix ; elle n'est troublée que quand le tien et le mien sont mal définis et mal respectés, et dans une société qui les abolirait tout serait guerre et bataille, pillage et carnage.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 265 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  84. Entre la gloire et la célébrité il y a la même différence qu'entre un Panthéon et un Pandémonium.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 265 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  85. En théorie la force dérive du droit, en pratique nous avons changé tout cela.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 265 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  86. Dans tous les jeux, et surtout au jeu de la guerre, il faut examiner ce qu'on peut perdre avant de songer à ce qu'on peut gagner.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 265 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  87. N'est-il pas bizarre que ce soient ordinairement les coups de plume qui amènent la guerre et les coups de fusil qui établissent la paix ?
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 266 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  88. À cheval sur les préjugés on tourne toujours dans le même cercle ; à cheval sur les passions on va loin... mais on se casse le cou.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 266 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  89. Il n'est pas nécessaire d'aimer les rois pour détester la populace.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 266 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  90. À la guerre, l'égalité d'obéissance aux ordres quels qu'ils soient est plus apparente que réelle ; les hommes intelligents exécutent bien les ordres qu'ils approuvent, et exécutent mal les ordres qu'ils blâment.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 266 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  91. À l'armée, comme dans tous les partis, les soldats servent le drapeau, et les chefs se servent du drapeau.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 444 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  92. Les beaux esprits qui ne sont jamais rassasiés d'esprit en ont bien vite donné une indigestion à leur auditoire.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 444 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  93. Une nation confie des armées à son prince comme le pubic confie des fonds à un banquier, pour les faire sagement valoir et non les risquer dans un jeu de spéculations effrénées. Le souverain, prodigue du sang des soldats que le pays lui prête, n'est pas plus magnanime que le dissipateur, qui jette par les fenêtres l'argent qu'il emprunte, n'est généreux.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 444 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  94. La richesse à acquérir fait plus de fripons que la richesse acquise ne fait d'honnêtes gens.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  95. Chez le pauvre l'orgueil est ridicule, chez le riche il est odieux, tout le monde le sait, tout le monde le sent... et cela ne corrige personne.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  96. On court après l'argent pour obtenir, grâce à lui, le repos et la considération, deux choses dont la poursuite de l'argent fait perdre la première et compromet fort la seconde.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  97. La modestie est un mérite chez le savant et n'est chez l'ignorant que l'absence d'un défaut.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  98. Le médecin est quelquefois utile au malade, et le malade l'est toujours au médecin.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  99. Dans les salons la porcelaine sert de cache-pot et la richesse de cache-sot.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  100. L'homme le plus heureux du monde, s'il est un bon observateur, remarque tant de choses déplorables et ridicules qu'il ne peut manquer de devenir à la fois triste et moqueur.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 445 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  101. C'est par des emprunts réciproques que la patience et l'audace arrivent à faire fortune.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 531 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  102. Un peuple qui a de la passion pour le bien-être, n'a plus que des velléités pour la gloire.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 531 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  103. Dénouer ce qu'on ne peut briser est l'oeuvre des sages, et briser ce qu'on ne peut dénouer est la besogne des héros.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 531 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  104. On aura beau prêcher l'égalité aux hommes, elle ne subsistera jamais entre eux que pendant deux heures, l'heure de la naissance et celle de la mort ; c'est deux heures sont essentielles, il est vrai, mais elles sont courtes.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 532 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)
     
  105. De bonnes lois font pour la fertilité d'un pays presque autant que le soleil.
    (Philosophie à l'ombre du drapeau, p. 532 in Revue de Bretagne et de Vendée, t.3, Nantes, 1858)