Robert M. Pirsig
1928
  1. Nous tenons plus à voyager qu'à arriver quelque part.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.16, Seuil/Points P456, 1978)
     
  2. Les meilleures routes font la jonction entre nulle part et nulle part, elles ne sont généralement que la variante d'un autre itinéraire plus rapide.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.18, Seuil/Points P456, 1978)
     
  3. Nous sommes toujours tellement pressés que nous n'avons pas souvent l'occasion de parler. Jour après jour, on reste à la monotone surface des choses. Les années passent, et on se demande comment elles ont pu se succéder si vite, et on les regrette.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.19, Seuil/Points P456, 1978)
     
  4. [...] on réprime toujours un accès passager de colère, quand il traduit une haine permanente et profonde.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.27, Seuil/Points P456, 1978)
     
  5. Il suffit de traverser une zone industrielle pour se trouver, en effet, confronté avec la technologie. On voit de hautes clôtures de barbelés, des grilles verrouillées, des panneaux d'INTERDICTION. Au-delà, noyées dans des vapeurs de suie, d'étranges formes de métal et de brique. Nul ne sait ce qui se trame dans la zone et l'on n'en connaît pas les maîtres. Comment ne pas se sentir étranger, perdu, exclu ? Votre présence même est indésirable en ces lieux. La technologie a ait de vous un étranger à qui l'on hurle : « Sors ! » Il y a bien une explication : ces usines servent l'humanité. Mais d'une manière indirecte. Ce qui saute aux yeux, tout de suite, ce sont les panneaux d'INTERDICTION. Ce qu'on voit, ce sont de petits hommes qui, comme des fourmis, s'occupent du monstre. Même si j'avais une place ici, même si je n'étais pas un étranger, je ne serais qu'une de ces fourmis, et je ressentirais de l'hostilité devant un semblable univers.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.28, Seuil/Points P456, 1978)
     
  6. Le divin Bouddha trouve aussi bien sa place dans les circuits d'un ordinateur, ou dans la boîte de vitesse d'une motocyclette, qu'à la cime d'une montagne ou dans les pétales d'une fleur. Ce serait rabaisser Bouddha que de penser le contraire - et se rabaisser soi-même.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.30, Seuil/Points P456, 1978)
     
  7. L'homme moderne aussi a ses fantômes, ses esprits.
    - Lesquels ?
    - Eh bien, les lois de la physique, de la logique... Le système numérique... Le principe de la substitution algébrique... Ce sont des fantômes. Mais nous y croyons avec tant de force qu'ils nous semblent vrais.

    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.45, Seuil/Points P456, 1978)
     
  8. - Nous sommes tous remplis d'arrogance et de prétention, nous rejetons les fantômes des autres. Mais nous sommes aussi ignorants, barbares et superstitieux qu'eux-mêmes quand il s'agit des nôtres.
    - Pourquoi est-ce que nous croyons tous à la loi de la gravitation universelle,alors ?
    - C'est de l'hypnose de masse - une hypnose connue sous le nom plus respectable d'éducation.

    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.46, Seuil/Points P456, 1978)
     
  9. Il arrive qu'une vérité vous échappe, parce qu'elle est infime. Il arrive aussi que vous ne la voyiez pas à cause de son évidence et de son énormité.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.67, Seuil/Points P456, 1978)
     
  10. C'est bien le problème : par où commencer.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.79, Seuil/Points P456, 1978)
     
  11. [...] son quotient d'intelligence au Stanford-Binet, ce test qui porte essentiellement sur l'habileté à manipuler les séries [...]
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.95, Seuil/Points P456, 1978)
     
  12. Mais les gens [...] faisaient l'erreur de considérer la personnalité comme un bien que l'on possède, tels les vêtements que l'on porte sur le dos. Or, qu'est-ce qu'on est d'autre que sa personnalité ? Un peu de chair et d'os, munis d'une carte d'identité ! Voilà les vêtements que porte la personne humaine.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.98, Seuil/Points P456, 1978)
     
  13. Le véritable but de la méthode scientifique est de s'assurer qu'on ne s'imagine pas savoir ce qu'en fait on ignore.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.118, Seuil/Points P456, 1978)
     
  14. Une expérience n'est jamais un échec, même lorsque les buts escomptés ne sont pas atteints. Il n'y a vraiment échec que lorsqu'on ne peut tirer d'une expérience aucune conclusion valable, dans un sens ou dans l'autre, sur l'hypothèse de départ.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.119, Seuil/Points P456, 1978)
     
  15. Parfois, mieux vaut voyager qu'arriver.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.130, Seuil/Points P456, 1978)
     
  16. Je crois que chaque professeur a tendance à pousser ceux de ses étudiants qui lui ressemblent le plus. S'il a lui-même, par exemple, une belle écriture, il attachera de l'importance à la calligraphie. S'il aime user de mots savants, il jugera ses étudiants sur leur vocabulaire.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.152, Seuil/Points P456, 1978)
     
  17. Enseigner, enseigner, jusqu'à l'abrutissement, jusqu'à perdre toute faculté de création, jusqu'à devenir un automate, répétant à l'infini les mêmes platitudes à des générations d'innocents, d'étudiants incapables de comprendre pourquoi leur professeur est si ennuyeux. Et rejaillit sur la société tout entière. Si les collèges fonctionnent de cette façon, c'est parce que c'est la façon la plus habile de faire des économies, tout en donnant l'illusion d'un enseignement de qualité.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.159, Seuil/Points P456, 1978)
     
  18. Chacun peut croire à la vérité, et aux méthodes rationnelles qui permettent de la découvrir. Chacun peut s'opposer aux consignes des autorités en place. Mais qui va jusqu'à se consumer soi-même, jour après jour, pour défendre sa cause ?
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.163, Seuil/Points P456, 1978)
     
  19. Le divorce entre l'art et la technique est vraiment contre nature - mais il dure depuis si longtemps, qu'il faudrait être archéologue pour retrouver son origine.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.179, Seuil/Points P456, 1978)
     
  20. La raison d'aujourd'hui, c'est la Terre plate du Moyen Âge. Si vous vous aventurez trop loin, on vous prévient que vous allez tomber. Dans la folie. Et cela fait peur. Cette peur de la folie, c'est la terreur médiévale du bout du monde. C'est l'horreur de l'hérésie.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.183, Seuil/Points P456, 1978)
     
  21. À l'école, on apprend à imiter. Pour avoir de bonnes notes, il faut imiter le professeur. À l'université, le procédé est un peu plus subtil : on est censé imiter le professeur, tout en le persuadant qu'on ne l'imite pas, mais qu'on a saisi la quintessence de son enseignement. En procédant ainsi, on est sûr d'avoir la meilleure note, tandis que l'originalité peut vous faire stagner en queue de classe. Tout le système des notes défavorise la recherche originale.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.209, Seuil/Points P456, 1978)
     
  22. Une étudiante déclara naïvement :
    - Mais on ne peut pas supprimer les examens. C'est pour ça qu'on est là !
    Ce qu'elle disait était vrai. Le mythe selon lequel les étudiants vont à l'université pour l'enseignement qu'ils y reçoivent, et non pour les diplômes qu'ils obtiennent, n'est qu'un mensonge hypocrite que personne ne veut dénoncer. Il y a bien quelques étudiants animés d'un réel désir d'apprendre, mais la routine et les rouages de l'institution universitaire les ramènent bien vite à une attitude moins idéaliste.

    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.211, Seuil/Points P456, 1978)
     
  23. Le problème le plus important, c'est la mentalité d'esclave qui a été insufflée aux étudiants, pendant des années, avec cette politique de la carotte et du bâton ! Une mentalité de mule : si tu ne me bats pas, je n'avance pas.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.212, Seuil/Points P456, 1978)
     
  24. En réalité, les notes permettent de dissimuler l'échec d'un enseignement. Un mauvais professeur peut faire cours pendant toute une année sans rien laisser de mémorable dans l'esprit de ses élèves, et les classer sur la base d'un exercice sans intérêt. Il donnera ainsi l'impression que certains ont progressé au cours de l'année - et les autres pas. Si on supprime les notes, les élèves sont contraints de se demander chaque jour s'ils apprennent vraiment quelque chose, ils se trouvent devant un vide effrayant.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.217, Seuil/Points P456, 1978)
     
  25. Il est difficile d'abolir un système ancré dans les esprits, si on ne le remplace pas par un autre.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.218, Seuil/Points P456, 1978)
     
  26. [...] la pensée de Cromwell : « Personne ne va si loin que celui qui ne sait pas où il va. »
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.226, Seuil/Points P456, 1978)
     
  27. Tout enseignant sait ce qu'est la Qualité. Au cas où l'un d'eux ne le saurait pas, qu'il dissimule soigneusement cette ignorance : elle ne manquerait pas de constituer une preuve de son incompétence.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.230, Seuil/Points P456, 1978)
     
  28. La morosité. Voilà le fond du problème. Quand on retire du monde la Qualité, on trouve un monde morose. L'absence de Qualité, c'est la morosité.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.234, Seuil/Points P456, 1978)
     
  29. Le plus grand imbécile du monde peut toujours déclarer que le soleil brille, cela n'empêchera pas le soleil de briller.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.248, Seuil/Points P456, 1978)
     
  30. On apprend aux enfants à ne pas faire ce qui leur plaît - mais ce qui plaît aux autres. Et qui sont les autres ? Les parents, les professeurs, les censeurs, les policiers, les juges, les officiels, les rois, les dictateurs. Bref, les autorités. Quand on vous a appris à n'avoir que du mépris pour ce qui vous plaît, vous devenez un serviteur docile des autres, un bon esclave. Quand vous acceptez de ne pas faire ce que vous aimez, le Système vous aime.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.251, Seuil/Points P456, 1978)
     
  31. La Qualité n'est pas un objet. Elle est un événement.
    [...]
    C'est l'événement par lequel le sujet prend conscience de l'objet.

    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.257, Seuil/Points P456, 1978)
     
  32. Le seul zen qu'on puisse trouver au sommet d'une montagne, c'est le zen qu'on y apporte.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.265, Seuil/Points P456, 1978)
     
  33. Le passé n'existe que dans nos souvenirs, le futur n'existe que dans nos projets. Le présent est notre seule réalité.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.266, Seuil/Points P456, 1978)
     
  34. L'eau des montagnes est le meilleur dessert du monde.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.275, Seuil/Points P456, 1978)
     
  35. La géométrie n'est pas vraie, elle est plus ou moins commode.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.285, Seuil/Points P456, 1978)
     
  36. [...] Il vaut mieux ne pas voir que de voir mal [...]
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.286, Seuil/Points P456, 1978)
     
  37. Pour résoudre le conflit entre les valeurs humaines et les nécessités de la technique, il ne sert à rien de vouloir fuir la technologie. C'est impossible. La seule issue, c'est de briser les barrières de la pensée dualiste, qui empêchent de comprendre la véritable nature de la technique. La technique n'est pas une exploitation de la nature, mais une fusion de la nature et de l'esprit : en une création nouvelle qui les transcende l'une et l'autre.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.314, Seuil/Points P456, 1978)
     
  38. Aussi convient-il, lorsqu'on travaille sur une motocyclette, ou lorsqu'on se consacre à n'importe quelle autre tâche, de cultiver la sérénité ; elle permet de demeurer en union avec le monde extérieur.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.320, Seuil/Points P456, 1978)
     
  39. Pour améliorer le monde, il faut commencer par améliorer son propre coeur, et sa tête, et ses mains - puis avancer, progressivement, vers le reste du monde.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.321, Seuil/Points P456, 1978)
     
  40. L'important est de bien mener sa vie. C'est votre façon de vivre qui vous permet, seule, d'éviter les pièges, et de voir ce qui importe. Vous êtes peintre, et vous voulez atteindre la perfection de votre art ? Rien de plus facile. Soyez d'abord parfait vous-même, et ensuite, peignez. Que ce soit en art ou en mécanique, votre travail est le reflet de votre mode de vie. Si vous vous conduisez comme un imbécile six jours par semaine, aucun truc ne vous rendra plus malin le dimanche, quand vous travaillerez sur votre machine.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.351, Seuil/Points P456, 1978)
     
  41. Toutes les voitures roulent à la vitesse maximale autorisée, pour regagner la ville au plus vite. Comme si chacun voulait sortir le plus rapidement possible du lieu où il se trouve. Comme si chacun pensait déjà à l'endroit où il a envie d'être, plutôt qu'à celui où il est.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.352, Seuil/Points P456, 1978)
     
  42. Sortir du mythe, c'est devenir fou.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.381, Seuil/Points P456, 1978)
     
  43. Nous condamnons toujours chez les autres ce que nous craignons de trouver en nous-même.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.410, Seuil/Points P456, 1978)
     
  44. Quand un berger emmène son chien à la chasse au loup, qu'il prenne garde de ne commettre aucun faux pas : le chien a des affinités avec le loup.
    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.423, Seuil/Points P456, 1978)
     
  45. - Tu me montreras ?
    - Bien sûr.
    - C'est difficile ?
    - Pas si on a un bon état d'esprit. C'est ça qui est difficile.

    (Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes, trad. Maurice Pons, André et Sophie Mayoux , p.446, Seuil/Points P456, 1978)