Georges Boutelleau
1846-1916
  1. Nos coeurs sont pleins de larmes lentes
    Qui n'osent couler de nos yeux,
    Comme ces orages des cieux
    Qui dorment dans les nuits brûlantes.

    Parfois le chos de nos douleurs,
    Ébranlant les fibres usées,
    Fait jaillir en longues rosées
    La source intime de nos pleurs.

    Plus souvent, trouvant d'âpres charmes
    Au secret des maux évoqués,
    Nous mourons fiers et suffoqués
    Par les flots grossis de nos larmes.

    (Le Camp de Göttingen, 5 septembre 1915, p. 128)
     
  2. Être poète, c'est aimer
    L'idéal rayonnant des choses,
    Le soleil, l'amour et les roses,
    Tout ce qui naît pour embaumer.

    Être poète, c'est comprendre
    Ce que le coeur a d'infini ;
    Plaindre le pauvre et le banni,
    Avoir la main prête à se tendre.

    Être poète, c'est souffrir
    D'une espérance inassouvie ;
    C'est donner mille fois sa vie,
    Et pourtant n'en jamais mourir.

    (Être poète, dans Les poètes français du XIXe siècle, (C. Fontaine), p.341, 1889)