Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

samedi 21 janvier 2012

Éditeurs, réveillez-vous !

L’annonce d’Apple ébranle.

Leur manière d’entrer dans le monde scolaire est tout simplement brillante ; l’idée d’offrir gratuitement une trousse de conception (Ibooks author) aux auteurs potentiels est géniale. Apple montre la voie.

Espérons maintenant que cette idée sera reprise par des développeurs de logiciels libres ; car, idéalement, il me semble que le produit final (le livre) devrait être dans un format ouvert.

Je ne sais pas comment les éditeurs scolaires vont prendre la chose. Mal, sans doute. Mais ils n’ont qu’eux-mêmes à plaindre.

Je me rappelle, à l’Aquops 1998 (ou 1999, je ne sais plus trop), j’avais présenté un atelier de deux heures sur une manière dynamique de faire des maths avec le web. Et j’avais prédit que les éditeurs de livres scolaires classiques, s’ils ne s’ajustaient pas à la nouvelle réalité, seraient appelés à disparaître. Dans la salle, un éditeur était rapidement intervenu en manifestant son grand scepticisme. Je crois que j’avais haussé les épaules.

Les éditeurs ont de grandes forces, c’est certain. Mais ils manquent d’imagination. Si j’étais dans leurs souliers, je demanderais une subvention au MELS pour développer, avec des gens du milieu, du matériel virtuel libre de droits pour les écoles québécoises. Je tenterais de prendre la direction dans ce domaine pour, éventuellement, me rendre indispensable. Pour cela, il faut que les éditeurs laissent tomber quelques principes auxquels ils tiennent obstinément.

Il faut en effet qu’ils apprennent à publier RAPIDEMENT (et avec plein d’imperfections) une première édition.
Il faut qu’ils laissent le livre évoluer librement après cette première édition.
Il faut qu’ils reconnaissent que la perfection n’est pas de ce monde, mais qu’un livre ouvert peut devenir éventuellement quasi parfait.
Il faut aussi qu’ils oublient l’idée d’une version unique.

Miette 8 : Chercher une aiguille dans une botte de foin

La vue

Chercher une aiguille dans une botte de foin

Sommaire. — Aiguille en main, botte devant soi. — Demi-tour! — Fixe! — Problème à résoudre. — Le roman, la femme et le charlatan.

Supposez que vous ayez devant vous une botte de foin — d'aucuns préfèrent que ce soit une charretée ; — je suis moins généreux et je crois qu'une botte suffira largement à l'expérience que je vais vous conseiller.

Vous avez donc devant vous une belle botte de foin ; laissez-y négligemment tomber une aiguille; faites une pirouette ; puis, une fois revenu en face de ladite botte, tâchez de retrouver votre aiguille. Quand vous y serez arrivé, vous me direz combien vous avez mis de temps à résoudre le problème... si toutefois vous y parvenez jamais.

Rien en effet n'est si difficile que de découvrir cette petite tige d'acier au milieu de toutes ces brindilles.

Désaugiers trouve que d'autres découvertes ne sont pas plus commodes à réaliser, quand il chante :

Chercher l'esprit dans un drame,
Le bon sens dans un roman,
La raison chez une femme,
L'honneur chez un charlatan,
Ah ! c'est chercher une aiguille
Dans une botte de foin.1

On voit que, s'il ne manquait pas d'humour, le chansonnier n'était pas tendre pour tout le monde.


1 [GGJ] Marc-Antoine Désaugiers (1772-1827) dans Le Foin.

Chemin faisant, page 22

Un homme qui rêve, c'est généralement le feu qui commence à prendre à la maison.

Les Anglais ont inventé le mot « shocking » pour les autres plus que pour eux-mêmes, les inventeurs ne profitant pas toujours de leurs inventions.

Les compagnons du rêve sont comme les compagnons de la débauche ; au réveil, on leur en veut toujours un peu.

Que tu le veuilles ou que tu ne le veuilles pas, si je suis estimable je t'impose l'estime.

Il y a de ces choses qu'on dit pour qu'elles ne nous soient jamais redites; c'est à l'amitié de les sentir et de les respecter.

On espère quelquefois moins par espérance que par besoin d'espérer.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

Lire le premier billet consacré à cette série.

Citations quotidiennes 21.01.12

[...] Parmi les goûts si divers que la Providence a départis aux humains, l'amour des livres est celui qui, après avoir donné, pendant la prospérité, les plus grandes, les plus véritables jouissances, ménage, pour toutes les peines de la vie, les plus douces, les plus pures, les plus durables consolations.
Jean-Baptiste Tenant de Latour (Mémoires d'un bibliophile, p. 251, E. Dentu, 1861)

Dans tous les êtres, notamment dans l'homme, deux forces se manifestent : la concentration du moi, qui intervient par la naissance, et sa dispersion, qui intervient par la mort.
Edmond Thiaudière (La Proie du Néant (Notes d'un pessimiste), p.219, Paul Ollendorff, 1886)

Le catholicisme se recommande à nous par sa durée, et il a l'évidence, la majesté ou, si l'aimez mieux, la brutalité d'un fait. La philosophie est la raison contente ; le protestantisme est une raison mécontente, qui se donne beaucoup de mal pour remplacer ce qu'elle a perdu.
Victor Cherbuliez (La vocation du comte Ghislain, p.16, Hachette, 1888)

Nous travaillons dur pour libérer l'extraordinaire énergie qui se trouve cachée dans l'atome et dans son noyau. Si nous ne consacrons pas une énergie égale - oui, et autant d'argent - à libérer le potentiel de chaque individu, alors le décalage énorme qui existe entre le niveau des ressources énergétiques physiques et celui des ressources humaines va nous condamner à une destruction universelle bien méritée.
Carl Rogers (Liberté pour apprendre?, Éd. Dunob)

[...] L'orgueil, dans les rois, est facile à blesser.
Jean-François Marmontel (Numitor, acte 1, sc. 1 (Agénor), 1782)

Voir Au fil de mes lectures.