Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

jeudi 29 décembre 2011

Une expérience

Suggestion d'une expérience à mener par nos bons universitaires.
  • Choisir quatre écoles avec un indice de défavorisation identique ;
  • Choisir quatre enseignants de 3e cycle (6e année) réputés «passionnés» ;
  • Ces enseignants œuvrent dans une des classes suivantes :
    • Une classe sans aucune technologie ;
    • Une classe avec 3 ordinateurs fonctionnels et branchés sur le web ;
    • Une classe avec un TBI (on tient pour acquis que l'enseignant sait s'en servir !) ;
    • Une classe dans laquelle chaque élève a un ordinateur portable sur son bureau ouvert en tout temps.
  • L'année suivante, on suit ces mêmes élèves en première secondaire, et on vérifie leurs taux de réussite.
Mon hypothèse ? Ce taux serait à peu près identique pour toutes les catégories d'élèves. Et vous, qu'en pensez-vous ?

La Folie de Charles Pougens (1775-1833)

De Wikipédia, écoutons d'abord Émile Littré nous parler de Charles Pougens :
« [Pougens] avait projeté un Trésor des origines de la langue française ; un Spécimen en a été publié en 1819, et deux volumes, sous le titre d'Archéologie française, en ont été tirés. Pour s'y préparer, il avait fait des extraits d'un grand nombre d'auteurs de tous les siècles ; ses dépouillements sont immenses ; ils remplissent près de cent volumes in-folio ; c'est la bibliothèque de l'Institut qui les conserve, et ils n'y sont que depuis deux ou trois ans ; j'y jette les yeux à mesure que j'imprime, et avec cette aide je fortifie plus d'un article, je remplis plus d'une lacune. Les manuscrits de La Curne de Sainte-Palaye et de Pougens sont des trésors ouverts à qui veut y puiser ; mais on ne peut y puiser sans remercier ceux qui nous les ont laissés. »
Émile Littré, Préface au Dictionnaire de la langue française, Introduction : X. Conclusion, 1863.

L'extrait suivant, tiré d'une des lettres de Pugens, a soulevé ma curiosité.

« Voici deux vers, ou pour mieux dire, un distique en prose rimée et dont je me souviens encore avec plaisir :
Le monde est plein de fous ; et qui n'en veut point voir,
Doit se tenir tout seul, et casser son miroir.
Certes je suis, comme personne ne l'ignore, un formidable explorateur, puisque j'ai réuni plus de cinq cent mille citations ou exemples tirés des principaux écrivains français et qui sont destinés à étendre les diverses acceptions des mots de notre langue, voyez mon dictionnaire grammatical raisonné de la langue française ; toutefois il m'a été impossible de découvrir l'auteur de ces deux vers. »
Charles Pougens, LETTRES sur diverses circonstances de ma vie. Lettre VI.

Une courte recherche sur le web m'indique que le voile est levé depuis fort longtemps sur l'origine de ce distique. C'est en effet un monsieur Desnoiresterres qui donne l'explication. C'est tiré de l'Intermédiaire des chercheurs et des curieux du 10 décembre 1866 :
Ces deux vers, il lui faudra les aller chercher dans les Discours satyriques et moraux1 du poëte Petit2 (Rouen, 1686, p. 30, au commencement de la satire IV, qui est une longue paraphrase de ces paroles du Sage : Le nombre des fous est infinis...)

Il en est sous le dais, sous le froc, sous la mitre ;
Et de sage Caton tel affecte le titre,
Qui passe pour un fat, mais un fat achevé,
Et mesme pour un fou hautement approuvé.
C'est une nation d'une telle étendue
Que de quelque côté que l'on tourne la vue,
Il s'en présente aux yeux, et qui n'en veut point voir,
Doit les tenir fermez, et casser son miroir.


Ces deux derniers vers sont bien frappés ; ils étaient dignes d'échapper à l'oubli dans lequel sont tombées les satires de ce poëte qui pourtant ne manque ni de verve, ni de nerf, ni de facture. Le seul moyen de les faire accepter comme vers proverbes, était sans doute de les détacher des précédents qui n'ont d'autre mérite que celui de les amener. À qui est-on redevable de ce petit travail de condensation ? C'est ce que nous ignorons. Ce ne sera pas, en tout cas, au marquis de Sade, car nous trouvons le distique comme épigraphe en tête de l'un des Entretiens des ombres aux Champs-Élisées (le IVe), qui parut en avril 1722.

Gust. Desnoiresterres.

1 [GGJ] Je respecte la graphie de M. Desnoiresterres.
2 [GGJ] Il s'agit de Louis Petit, né vers 1614 et mort en 1693.

Citations quotidiennes 29.12.11

En vérité l'homme qui veut contempler en face la gloire de Dieu sur la terre doit contempler cette gloire dans la solitude.
Edgar Allan Poe (Nouvelles histoires extraordinaires, Folio n° 564)

Qu'est-il donc ce serpent qui, dit-on, habite chacun de nous ? Égoïsme, Jalousie, Destin ? Peut-être quelque chose d'analogue au « Karma », qui les contient tous trois, et dont nous ne pouvons disposer à notre gré. [...] le serpent qui se cache en chacun de nous est une triste chose. Un jour, dans un livre, j'ai rencontré ces mots : « Le chagrin d'être en vie », et, tandis que j'écris cette lettre, j'éprouve ces chagrins que rien ne saurait apaiser. Quelle est donc cette écoeurante, cette effroyable, cette triste chose que nous portons au dedans de nous ?
Yasushi Inoué (Le Fusil de chasse, trad. Sadamichi Yokoö, Sanford Goldstein et Gisèle Bernier, p.78, Livre de Poche/Biblio n°3171)

On peut être étourdi, léger, inconséquent,
Et brave en même temps.
Marc-Antoine-Jacques Rochon de Chabannes (Le Jaloux, acte 5, sc. 4 (Le Chevalier), 1784)

Pourquoi dire compagnon au lieu de mari ? Euphémisme, périphrase, litote ? Si, dans un groupe quelconque, on ne peut pas employer tel mot, il est certain que l'on fait face à un processus de censure. Les gens qui pensent qu'on peut disposer des mots comme des mouches sont des ignorants.
Monique LaRue (La gloire de Cassiodore, p.163, Boréal, 2002)

Voir Au fil de mes lectures.