La pire façon de condamner certaines idées est de les imputer à crime. Un crime est un crime et une opinion n'est pas un crime, quelque influence qu'on lui impute. Interdire un propos sous le prétexte qu'il peut être nocif ou choquant, c'est mépriser ceux qui le reçoivent et les supposer inaptes à le rejeter comme aberrant ou ignoble. C'est en fait, selon la méthode du clientélisme politique et consumériste, les persuader implicitement qu'ils ont besoin d'un guide, d'un gourou, d'un maître.
Raoul Vaneigem, Rien n'est sacré, tout peut se dire, p.28, Éd. La Découverte, 2003)