Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

jeudi 16 décembre 2004

C'est peu de chose, dis-tu...

Je suis de plus en plus content de mon site Épigraphe. Je m'aperçois que les épigraphes d'un livre peuvent vraiment donner le goût de le lire. C'est ainsi que suite à une contribution de Patrick Druart, j'ai effectué une petite recherche sur le livre La Résistance et ses poètes de Pierre Seghers et je suis tombé sur cette page. On y trouve :
[...] Jean Paulhan, autre figure centrale de la lutte intellectuelle. En quelques pages magnifiques, il résume l’enjeu de la Résistance, dérisoire et indispensable. À ceux qui affirment que beaucoup sont morts pour peu de chose – « un renseignement (pas toujours très précis) ne valait pas ça » – il répond: « Tu peux serrer dans ta main une abeille jusqu’à ce qu’elle étouffe. Elle n’étouffera pas sans t’avoir piqué. C’est peu de chose, dis-tu. Oui, c’est peu de chose. Mais si elle ne te piquait pas, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’abeilles. »
En quelques mots, Paulhan décrit toute la misère, mais aussi toute la grandeur de cette vie. Je vais acheter ce livre...

Ma citation quotidienne

Toute ma jeunesse on me disait: Vous verrez quand vous aurez 50 ans. J'ai 50 ans. Je n'ai rien vu.
Erik Satie

16 décembre 2004. J'ai aujourd'hui quarante-dix ans.

mercredi 15 décembre 2004

Ma citation quotidienne

[La normalisation est] un mot qu'aiment les dictatures de bureaucrates.
Claude Roy in Permis de séjour 1977-1982, p.241, Folio n°1700

Lire plusieurs autres citations de ce grand humaniste que fut Claude Roy.

mardi 14 décembre 2004

L'espérance

Nos espoirs ne seraient-ils que des prétextes à nos élans?
Jean Rostand


En lisant les derniers billets de Francois Guité (ici et ) il m'est revenu une conversation tenue il y a quelque temps avec une amie enseignante :
- L'école ne sert à rien. Les jeunes n'ont pas de plaisir. L'école, c'est plate.
- Alors pourquoi tu continues d'y oeuvrer, me lance-t-elle.
J'ai alors pris deux à trois minutes pour répondre car, voyez-vous, je me posais depuis plusieurs années cette même question. Sans y trouver de réponse. Et, tout à coup, j'ai eu la révélation.
- Tu sais, dis-je, je ne pense pas vraiment faire un changement quelconque. En fait, je suis à peu près persuadé que ça ne donne absolument rien, ce que je fais.
- Qu'entends-tu par à peu près persuadé?
- Que j'évalue à 99,99%, les probabilités que mon travail ne donne absolument rien. Que c'est du vent. Que le système va rester tel quel. Que les jeunes et les adultes qui veulent vraiment apprendre quelque chose devront le faire en dehors du système d'éducation actuel...
- Pourquoi ne quittes-tu pas le domaine, alors?
- Parce que si des gens comme moi - et comme bien d'autres, en fait - qui veulent vraiment un meilleur système d'éducation quitte le domaine, alors c'est 100% certain qu'il n'y aura pas de changement... Je sais bien que les innovateurs ne sont pas très appréciés dans le système éducatif, mais s'ils se mettent à le quitter, alors tout est fichu...

samedi 11 décembre 2004

La connaissance

Connaître, c'est primairement computer

Nous sommes encore aux débuts de la connaissance artificielle, et nous avons interrogé les débuts de la connaissance vivante. En dépit des énormes différences de l'une à l'autre, il y a ce trait fondamental commun: connaître, c'est primairement computer. La connaissance, nous le verrons, ne se réduit nullement à la computation, mais nous pouvons supposer qu'elle comporte toujours de la computation.
Une computation est une opération sur/via signes/symboles/formes. Connaître, c'est effectuer des opérations dont l'ensemble constitue traduction/construction/solution.
Autrement dit, la connaissance est nécessairement:
- traduction en signes/symboles, et systèmes de signes/symboles (puis, avec les développements cérébraux, en représentations, idées, théories...);
- construction, c'est-à-dire traduction constructrice à partir de principes/règles («logiciels) qui permettent de constituer des systèmes cognitifs articulant informations/signes/symboles;
- solution de problèmes, à commencer par le problème cognitif de l'adéquation de la construction traductrice à la réalité qu'il s'agit de connaître.
C'est dire que la connaissance ne saurait refléter directement le réel, elle ne peut que le traduire et le reconstruire en une autre réalité.

Edgar Morin, La Méthode 3. La Connaissance de la Connaissance, Seuil, 1986

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