Je pense qu'un problème important est ce concept, faux à mon avis, de la «plus-value» apportée par les TIC.


Un exemple : je n'ai absolument pas besoin des TIC pour enseigner les maths. Je m'installe au tableau, écris les formules à digérer, envoie quelques problèmes de vie aux élèves, leur donne quelques minutes pour y répondre, et on corrige le tout. C'est fini. Et on répète cette technique pédagogique au prochain cours. Dites-moi un peu : que peut m'apporter mon beau portable tout neuf là-dedans ? Ah oui : j'envoie un courriel d'encouragement aux élèves, et, si le temps me le permet, je vais faire un petit «Powerpoint» pour leur indiquer le contenu du cours , et pourquoi pas, je vais rédiger mes examens sur mon traitement de texte. Wow, la «plus-value» ! C'est plus de «troubles» que d'autres choses...

En fait, l'idée EST DE NE PLUS penser comme ça : le prof dispensateur de la connaissance, l'élève le gobeur et le recracheur de cette belle connaissance. Or SI on ne pense plus comme ça, les TIC sont indispensables : plus question d'enseigner sans un logiciel de géométrie dynamique, sans un langage de programmation, sans la construction d'animation pour illustrer les concepts, sans la création de robots, sans l'utilisation de logiciels à calculs symboliques, etc. Non pas parce que J'ENSEIGNE avec ça, mais parce que l'élève APPREND avec ça. D'un portable, on doit absolument équiper ce prof qui vit dans un autre monde, un autre paradigme. Lui, il saura l'utiliser intelligemment.

À mon avis, le gros problème avec les TIC dans la province de Québec vient de cette ex-ministre Marois qui nous a demandé il y a quelques années d'écrire des plans TIC qui justifieraient l'achat d'équipement. J'en ai écrit, un plan. Parce que je croyais bien qu'elle les lirait. Foutaise. Je suis convaincu qu'elle ne sait même pas ouvrir un ordinateur. Je suis convaincu qu'elle ne les a jamais lu : l'objectif était juste d'amener TOUT LE MONDE à un ratio de 1 ordi pour 10 élèves. Dans le centre où je travaillais, on y était déjà. La réponse de la Ministre : Rien chez vous, car vous avez déjà le ratio. J'étais furieux et le suis toujours d'ailleurs.

J'en ai marre de nos dirigeants incompétents qui font avant tout de la politique (on donne un «minimum» à tout le monde, donc on sera réélu) au lieu de prendre des risques intelligents : donner aux innovateurs, aux créateurs, aux penseurs qui sont dans le système pour que les changements s'installent en provenant du terrain. Donner enfin à ces gens la structure nécessaire pour qu'émerge le changement. Mais on ne comprend pas ça dans la province.

Je suis donc tout à fait contre le don à tous de portables, voire d'ordinateur dans la classe. C'est évident que ça ne donne rien. Je suis pour le don d'un portable (et de tonnes de machines pour les élèves de la classe) à ceux qui ont fait le saut, ceux qui pensent autrement. Il est tout à fait ridicule de penser qu'en donnant à tous, ils feront un saut quantique. Ils ne réussiront qu'à faire des petits pas qui ne les amèneront pas bien loin.