Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

samedi 25 mars 2006

Balzac et autres

J'ai fait de belles découvertes au Loisir des usagers de Gatineau. J'ai en effet mis la patte sur l'intégrale de la Comédie humaine de Balzac en 7 volumes (Seuil, 1965 à 1966). Je possédais déjà quelques livres de cette magnifique collection (Vigny, La Fontaine, Pascal, Musset, Montesquieu) et, pour moins de 100 $, je crois avoir fait un très bon achat. Surtout que tous les livres sont à peu près comme neufs.



Je suis aussi tombé sur un très vieux bouquin écrit par Pierre Larousse : Jardin des racines grecques à l'usage des écoles professionnelles, des écoles normales, des pensionnats de demoiselles et des écoles primaires des deux sexes. Il s'agit là d'une « étude raisonnée de plus de 4000 mots que les Sciences, les Arts, l'Industrie ont empruntés à la langue française. »

Selon Wikipédia, Larousse a publié la première édition de ce jardin en 1858. On y apprend aussi qu'il a rédigé un Jardin des racines latines (1860). Aucune date ne se trouve à l'intérieur de mon édition mais je suis convaincu qu'il s'agit là d'un tirage d'avant 1900. L'exemplaire est plutôt défraichie, mais pour 12$, je ne trouve absolument rien à redire. Même que sur Abebooks, un revendeur demande 60 euros pour ce qui semble être le même livre.

Écoutons Larousse, dans sa préface :

Les élèves auxquels s'adresse cet ouvrage, se trouvent introduits en quelque sorte dans l'arsenal où se forgent tous les termes nouveaux tirés de la langue grecque ; ils en saisiront le mécanisme, la raison, et ne seront plus réduits à accepter sur parole des définitions qui, ne reposant pour eux sur aucun fondement, ne laisseraient pas de trace durable dans leur esprit.
(p. VII)
L'idée capitale qui domine tout notre système lexicologique d'enseignement, c'est de plaire en instruisant. [...] Espérons que les élèves verront arriver avec plaisir l'heure de la leçon des Racines grecques. Pour ce qui regarde l'enseignement, nous avons toujours admiré cette parole d'un ancien, auquel on demandait comment il fallait instruire les enfants : « Faire en sorte, répondit-il, que les choses bonnes et utiles leur plaisent. »
(p. IX)
Aujourd'hui, on ne voyage plus, on arrive ; ceux qui marchent sont écrasés ; la vapeur a réduit l'espace, l'électricité l'a supprimé, et cette frénésie, ce steeple-chase général a pénétré jusque dans le domaine de la vie intellectuelle : à vingt ans, on est déjà lancé dans le tourbillon, à la poursuite des honneurs ou de la fortune. Ce livre répond donc à un besoin du siècle, de ce siècle de positivisme où l'on est tourmenté des ambitions de l'homme mûr sans avoir savouré l'insouciance de l'enfant,
Où l'on est bientôt vieux sans avoir été jeune.
(p. X)
Au hasard, ne connaissant absolument pas cet auteur, j'ai aussi fait l'acquisition de trois pièces de théâtre de René de Obaldia : Genousie, Le Satyre de la Villette et Le Général inconnu. À la maison, j'ai ouvert mon Larousse des littératures pour apprendre que Obaldia est un écrivain français né en 1918 et « ses pièces, drôles et grinçantes revendiquent l'irresponsabilité et l'illogisme. » Encore une fois, Wikipédia vous en apprendra un peu plus.

Je termine avec deux défis. 1. Dans le deuxième extrait de Larousse, il mentionne un ancien. De qui s'agit-il ? 2. Quel est l'auteur de la citation « Où l'on est bientôt vieux sans avoir été jeune. » et de quelle oeuvre est-elle tirée ?

jeudi 23 mars 2006

Florian

J'ai reçu aujourd'hui un très beau livre de 1845 contenant les cinq livres de fables de Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794). Il était le petit-neveu de Voltaire et, apprend-on dans le Dictionnaire des Littératures de Larouse, « il fait ses Fables (1792) l'illustration un peu plate et scolaire d'une leçon de morale ou d'un proverbe. ».

Voyez par exemple Le Chat et le miroir, fable IV du livre 1. À droite la numérisation de la gravure qui l'illustre.

Philosophes hardis qui passez votre vie
À vouloir expliquer ce qu'on n'explique pas,
Daignez écouter, je vous prie,
Ce trait du plus sage des chats.

Sur une table de toilette,
Le chat aperçut un miroir;
Il y saute, regarde, et d'abord pense voir
Un de ses frères qui le guette.
Notre chat veut le joindre, il se trouve arrêté.
Surpris, il juge alors la glace transparente,
Et passe de l'autre côté,
Ne trouve rien, revient, et le chat se présente.
Il réfléchit un peu; de peur que l'animal,
Tandis qu'il fait le tour, ne sorte,
Sur le haut du miroir, il se met à cheval,
Deux pattes par ici, deux par là ; de la sorte
Partout il pourra le saisir.
Alors, croyant bien le tenir,
Doucement vers la place il incline la tête,
Aperçoit une oreille, puis deux... À l'instant,
À droite, à gauche, il va jetant
Sa griffe qu'il tient toute prête;
Mais il perd l'équilibre, il tombe et n'a rien pris.
Alors, sans davantage attendre,
Sans chercher plus longtemps ce qu'il ne peut comprendre,
Il laisse le miroir et retourne aux souris.
« Que m'importe, dit-il, de percer ce mystère ?
Une chose que notre esprit,
Après un long travail, n'entend ni ne saisit,
Ne nous est jamais nécessaire. »

Je me donne quelques semaines pour lire tranquillement le bouquin. Vous devriez alors retrouver des citations de ce fabuliste sur Au fil de mes lectures.

mercredi 15 mars 2006

Thibon

J'aime bien Gustave Thibon. Philosophe catholique, par des phrases simples, il permet de comprendre comment l'intelligence peut s'accommoder de la croyance. Curieusement, il me fait regretter de ne pas avoir la foi. Je viens tout juste de terminer L'Échelle de Jacob (Fayard, 1942. Réédition Boréal Express, 1984) et d'ici quelques jours plusieurs extraits apparaîtront sur Au fil de mes lectures. Un avant-goût :

« L'amour commence par l'éblouissement d'une âme qui n'attendait rien et se clôt sur la déception d'un moi qui exige tout. » (p.39)

« Il faut partir de l'absolu dans la pensée pour réaliser le relatif dans l'action. » (p.119)

« Limites de la réceptivité -  Voici des gens pendus à toutes les radios, avides de toutes les nouvelles, réceptifs à toutes les idées. On appelle cela sensibilité, ouverture. C'est une qualité que je n'envie pas. Je serais plutôt porté à considérer comme un signe de santé et d'unité intérieures l'existence de larges zones d'indifférence. Une réceptivité universelle implique, exception faite de quelques esprits extraordinaires, une passivité dangereuse. L'écho vibre à tous les sons, mais la bouche choisit ses paroles. » (p. 141)

« Dès qu'un mot devient trop à la mode (je songe à l'engouement actuel pour la pureté, la gratuité, l'engagement, la présence, etc.), il faut se demander ce qu'il recouvre plutôt que ce qu'il signifie. Et c'est en général son contraire. La mode sort du manque. La chose « se porte » quand elle n'est plus ; elle devient vêtement lorsqu'elle a cessé d'être corps. » (p. 146)

« Tout bonheur qui n'enfante pas un devoir amoindrit ou corrompt.  » (p. 177)

Lianes

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Au fil de mes lectures de Gustave Thibon