Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

dimanche 15 janvier 2006

Le «mal/bien-penser»

Éthique est le sixième et dernier volume de la célèbre Méthode d'Edgar Morin. Comme mentionné en quatrième de couverture, faire son devoir n'est souvent ni simple ni évident, mais incertain et aléatoire : c'est pourquoi l'éthique est complexe. Et ce livre explore justement cette complexité. Sa lecture est relativement facile et, à mon avis, peut être une bonne introduction à La Méthode, même s'il en constitue le point d'arrivée. N'est-ce pas là un merveilleux signe que la compréhension est complexe et peut s'aborder de plusieurs façons ?
Vous trouverez plusieurs citations sur Au fil de mes lectures, mais je ne peux vous laisser sans ce large extrait qui résume bien, à mon avis, la complexité du bien-penser. Je suggère de vous en faire une jolie copie papier que vous pourrez garder tout près : sa relecture, avant d'entamer une discussion, ne peut être que bénéfique !

Extrait des pages 64, 65 et 66 :

Le « mal-penser »

- morcelle et cloisonne les connaissances,
- tend à ignorer les contextes,
- fait le black-out sur les complexités,
- ne voit que l'unité ou la diversité, mais non l'unité de la diversité et la diversité de l'unité,
- ne voit que l'immédiat, oublie le passé, ne voit qu'un avenir à court terme,
- ignore la relation récursive passé/présent/futur,
- perd l'essentiel pour l'urgent, et oublie l'urgence de l'essentiel,
- privilégie le quantifiable et élime ce que le calcul ignore (la vie, l'émotion, la passion, le malheur, le bonheur),
- étend la logique déterministe et mécaniste de la machine artificielle à la vie sociale,
- élimine ce qui échappe à une rationalité close,
- rejette ambiguïtés et contradictions comme erreur de pensée,
- est aveugle au sujet individuel et à la conscience, ce qui atrophie la connaissance et ignore la morale,
- obéit au paradigme de simplification qui impose le principe de disjonction ou/et le principe de réduction pour connaître, et qui empêche de concevoir les liens d'une connaissance avec son contexte et avec l'ensemble dont elle fait partie,
- mutile la compréhension et handicape les diagnostics,
- exclut la compréhension humaine.

Le « travailler à bien penser »

- relie,
- décloisonne les connaissances,
- abandonne le point de vue mutilé qui est celui des disciplines séparées et cherche une connaissance polydisciplinaire ou transdisciplinaire,
- comporte une méthode pour traiter les complexités,
- obéit à un principe qui enjoint à la fois de distinguer et de relier,
- reconnaît la multiplicité dans l'unité, l'unité dans la multiplicité,
- dépasse le réductionnisme et le holisme en liant
- reconnaît les contextes et les complexes et permet donc d'inscrire l'action morale dans l'écologie de l'action,
- inscrit le présent dans la relation circulaire
- n'oublie pas l'urgence de l'essentiel,
- intègre le calcul et la quantification parmi ses moyens de connaissance,
- conçoit une rationalité ouverte,
- reconnaît et affronte les incertitudes et contradictions,
- conçoit le dialogique qui intègre et dépasse la logique classique,
- conçoit l'autonomie, l'individu, la notion de sujet, la conscience humaine,
- opère ses diagnostics en tenant compte du contexte et de la relation local-global,
- s'efforce de concevoir les solidarités entre les éléments d'un tout, et par là tend à susciter une conscience de solidarité. De même sa conception du sujet le rend capable de susciter une conscience de responsabilité ; il incite donc à ressourcer et régénérer l'éthique,
- reconnaît les puissances d'aveuglement ou d'illusion de l'esprit humain, ce qui conduit à lutter contre les déformations de la mémoire, les oublis sélectifs, la self-deception, l'auto-justification, l'auto-aveuglement.

dimanche 8 janvier 2006

Les sept savoirs

Je suis en train de lire La Méthode 6 (L'Éthique) d'Edgar Morin. J'en reparlerai ici, mais en attendant, pourquoi ne pas (re)lire les Sept savoirs nécessaires à l'éducation du futur (Seuil, 2000) dont vous trouverez plusieurs extraits sur Au fil de mes lectures.

Voici un petit résumé de ces savoirs essentiels :

Les cécités de la connaissance : l'erreur et l'illusion

Il est nécessaire d'introduire et de développer dans l'enseignement l'étude des caractères cérébraux, mentaux et culturels des connaissances humaines, de ses processus et de ses modalités, des dispositions tant psychiques que culturelles qui lui font risquer l'erreur et l'illusion. (p.11)

Les principes d'une connaissance pertinente

Il est nécessaire de développer l'attitude naturelle de l'esprit humain à situer toutes ses informations [EM parle ici des connaissances capables de saisir les problèmes globaux et fondamentaux pour y inscricre les connaissances partielles et locales] dans un contexte et un ensemble. Il est nécessaire d'enseigner les méthodes qui permettent de saisir les relations mutuelles et influences réciproques entre parties et tout dans un monde complexe. (p12)

Enseigner la condition humaine

[...] reconnaître l'unité et la complexité humaines en rassemblant et en organisant des connaissances dispersées dans les sciences de la nature, les sciences humaines, la littérature et la philosophie, et de montrer le lien indissoluble entre l'unité et la diversité de tout ce qui est humain. (p.13)

Enseigner l'identité terrienne

Il convient d'enseigner l'histoire de l'ère planétaire qui commence avec la communication de tous les continents au XVIe siècle, et de montrer comment sont devenues inter solidaires toutes les parties du monde sans pour autant occulter les oppressions et les dominations qui ont ravagé et ravagent encore l'humanité. (p.13)

Affronter les incertitudes

Il faudrait enseigner les principes de stratégies, qui permettent d'affronter les aléas, l'inattendu et l'incertain, et de modifier leur développement, en vertu des informations acquises en cours d'action. Il faut apprendre à naviguer dans un océan d'incertitudes à travers des archipels de certitude. (p.14)

Enseigner la compréhension

La compréhension mutuelle entre humains, aussi bien proches qu'étrangers, est désormais vitale pour que les relations humaines sortent de leur état barbare d'incompréhension.
D'où la nécessité d'étudier l'incompréhension, dans ses racines, ses modalités et ses effets. (p.15)

L'éthique du genre humain

L'éthique doit se former dans les esprits à partir de la conscience que l'humain est à la fois individu, partie d'une société, partie d'une espèce. Nous portons en chacun de nous cette triple réalité. Aussi, tout développement conjoint des humains doit-il comporter le développement conjoint des autonomies individuelles, des participations communautaires et de la conscience d'appartenir à l'espèce humaine. (p.16)

dimanche 1 janvier 2006

Accoucher de mèmes

Le mème est à la culture ce que le gène est à la vie.


Il est à peu près impossible que les lecteurs de ce blogue trouvent inintéressante cette introduction à la mémétique. La quatrième de couverture est ici. Profitez-en pour parcourir, sur cette même page, la liste des suggestions de lectures. Attention cependant : il est certain qu'après avoir terminé ce bouquin, vous dévouvrirez des mèmes tout autour de vous. Et, consciemment, vous deviendrez un « réplicateur ».

Lianes :
Citations tirées de ma lecture
Le blogue de Pascal Jouxtel
Le site francophone de la mémétique
Pascal Jouxtel : « l’internet, nouveau terrain de réplication »
La mèmerie