Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

mercredi 29 février 2012

Chemin faisant, page 62

Ne croyez ceux qui disent : « Fi de l'or ! » que s'ils en ont des piles sous la main.

La tentation est une habile maîtresse qui nous caresse sans nous aimer, qui nous émeut sans s'émouvoir.

La vie nous demande toujours, et quand nous ne lui donnons pas, elle prend.

La vie nous oblige bien inutilement à penser à nous : personne, je crois, ne l'eût oublié.

L'esprit de sa position, la force de sa tâche, le caractère de son milieu, dons précieux du sort.

Un noble ne s'ignore jamais, un riche fort rarement, un sot toujours.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mardi 28 février 2012

Chemin faisant, page 61

La logique ne colore pas, elle fait mieux : elle proportionne.

Les traditions sont de silencieuses cohortes : elles veillent sur les morts et sur leurs testaments.

Il en est du bonheur comme d'une mère, on ne le comprend bien que lorsqu'on ne l'a plus.

On est toujours riche quand on se suffit, et à peu près heureux quand on s'approuve.

Il ne faut pas juger les actions des autres d'après nos tentations, mais d'après les leurs.

On l'excuse si gentiment que le péché reste l'enfant prodigue allant toujours prodiguant.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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lundi 27 février 2012

Chemin faisant, page 60

Notre coeur a l'âge de nos passions.

L'être qui regrette est encore bien vivant.

Le malheur donne souvent de l'esprit à ceux qui n'en ont pas, et le bonheur en ôte souvent à ceux qui en ont.

Le secret d'autrui, c'est l'enfant adopté; à lui d'abord nos attentions et nos soins.

Un bon ouvrier ne trouve pas toujours de l'ouvrage, mais un bon coeur trouve toujours de l'emploi : le malheur n'est-il pas le plus vaste de tous les ateliers?

L'épreuve nous connaît mieux que nous-même : elle nous révèle notre côté vulnérable en l'attaquant.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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dimanche 26 février 2012

Chemin faisant, page 59

Il est des gens qui n'ont pas volé l'oubli.

Deux débris s'étayent-ils ou croulent-ils plus vite par le rapprochement ?

On ne devrait discuter qu'avec ses égaux, car il y a des opinions de caste comme il y a des vérités de situation.

L'adresse nous sert tous les jours, l'intelligence tous les dimanches.

La discrétion qui survit à l'amitié est une rarissime vertu.

Que de coupes de ciguë rencontre le bon sens !

Que de gens on accompagne à la frontière pour voir de plus près leurs talons !

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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samedi 25 février 2012

Chemin faisant, page 58

Aimer Dieu, ce n'est pas seulement admirer toutes ses oeuvres, c'est accepter toutes ses lois.

Le goût est presque un sentiment.

Accepter la leçon que veut nous faire un ignorant, quel bon petit acte d'humilité !

Le livre qui va paraître, c'est comme la jeune fille qui va se marier; il ne faut pas trop raccourcir les fiançailles : ce qui suit vaudra-t-il ce qui précède ?

Les riches qui pensent, les pauvres qui plaignent, les jeunes qui sentent, les vieux qui aiment, tous gens d'exception.

Diminuer ses besoins, c'est remplir sa bourse.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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vendredi 24 février 2012

Chemin faisant, page 57

Il y a des gens qui font en souriant les plus grandes choses, comme d'autres en pleurant les plus petites.

Le caprice convient à certaines femmes comme le bijou à certaines oreilles ; il complète leur expression.

N'est-il pas pénible de se dire qu'aimer ce n'est pas toujours respecter ?

L'expérience est une ride qui vient rarement avant le temps.

Un des grands défauts des gens d'esprit, c'est de nous rapetisser les autres.

Comme à la fleur, ne demande à l'amabilité que son parfum.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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jeudi 23 février 2012

Chemin faisant, page 56

C'est diminuer son repos que d'augmenter l'importance des petites choses, que d'exiger l'acte de naissance de toutes les intentions.

Pour vivre, tout a besoin d'amour et de soins l'homme, le nid, la plante, la vertu.

L'oubli se loge dans chaque respiration du temps.

Si les temps héroïques revenaient, le déchaînement des idées les surprendrait plus que le déchaînement des passions.

Comparer, c'est toujours faire une victime.

Tout ce qui nous résiste crée en nous un embryon de vice ou de vertu.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mercredi 22 février 2012

Chemin faisant, page 55

On n'est jamais seul avec l'imagination, souvent même elle convie autour de vous trop nombreuse compagnie.

Nous devons à l'opinion tout ce que notre conscience lui accorde, - pas plus que cela.

L'étonnement est une sorte de pudeur, une espèce d'innocence, un reste de jeunesse, que quelques âmes privilégiées conservent jusqu'à la fin.

On a souvent de la sagesse pour les autres tout en n'ayant pour soi que de la folie.

L'imagination n'est pas une menteuse de race : elle ment moins pour nous tromper que pour nous distraire ; à nous de savoir en user.

Juger, la plupart du temps, c'est barboter.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mardi 21 février 2012

Chemin faisant, page 54

L'audace est une impatience du courage.

La mort de l'enfant et la trahison de l'ami, deux douleurs auxquelles on ne peut pas se préparer.

Rêver, c'est jeter la bride sur le cou de son désir ; c'est le voir s'agiter en tous sens, l'entendre rire autour de soi ; c'est le surprendre dans tous les coins de son coeur, dans tous les replis de sa pensée ; c'est oublier pour une heure les rancunes d'hier, les injustices du jour, les luttes du lendemain ; c'est rapprocher le possible de l'impossible, le fini de l'infini ; c'est visiter toutes les fantaisies et c'est n'aborder nulle part.

Vouloir être seul, c'est toujours vouloir donner rendez-vous à un quelqu'un ou à un quelque chose.

En amour, les vieux baisers sentent les vieilles loques ; ils ont un air tout aussi fripé.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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lundi 20 février 2012

Chemin faisant, page 53

Rien n'est plus à nous que notre chagrin.

Que d'ingrédients divers entrent dans la composition de la louange : la vérité, le mensonge, l'envie, l'affection, la banalité, l'indifférence, sans oublier le parfum à la mode !

O chagrin ! si tu peux t'épancher franchement, ne te plains pas, tu as encore la partie belle et le sort t'est généreux.

La gloire est toujours pauvre à côté du bonheur.

Il y a de l'audace à vouloir sonder sa douleur.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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dimanche 19 février 2012

Chemin faisant, page 52

La douleur qui se compare est déjà sur le chemin de la résignation.

On ne montre ses plaies cachées qu'aux âmes de choix.

Pour certaines âmes basses la médisance est un métier, j'ai presque dit un gagne-pain.

Que de charités on exerce en se respectant simplement soi-même !

S'écarter le plus possible des gens vulgaires, c'est la meilleure réplique à leur donner.

Toute chose tire son importance de celui qui s'en sert.

Il ne faut pas faire avec la Providence comme ces enfants qui ne veulent que le jouet de leur goût; acceptons le bonheur qu'elle nous donne, si elle ne nous offre pas mieux.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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samedi 18 février 2012

Chemin faisant, page 51

Il y a des erreurs qui sont saintes tant elles sont généreuses, et qu'il faut savoir respecter quand on ne peut pas ou qu'on ne doit pas dire la vérité.

On estime l'homme avec lequel on s'explique.

L'indécision nous rend mineurs toute notre vie.

Il y a de pénibles jouissances, de doux regrets, d'affectueuses séparations, de charitables ironies, de luxueuses détresses ; qu'est-ce qu'il n'y a pas ici-bas ?

Aimer, ce n'est pas toujours absoudre l'être aimé, c'est regretter de ne pouvoir toujours le faire.

La nature se sert des gens vulgaires pour faire souffrir ceux qui ne le sont pas.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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