Les moines copistes sont à l'imprimerie de Gutemberg
ce que les éditeurs sont au numérique.


Je suis convaincu que l'objet livre disparaîtra. Il suffit d'imaginer un livre électronique avec des "e-pages" avec le même confort de lecture que procure le livre actuel. On branche ce livre dans un ordinateur et on y télécharge le contenu désiré. Du coup, les librairies deviennent obsolètes. Évidemment, je suppose qu'on nous cachera le plus longtemps possible l'invention de ces e-pages. (Voir l'encre électronique. Voir aussi ce billet.)

C'est pourquoi je pense que le monde de l'édition devrait immédiatement penser à sa survie. En fait, je ne sais pas si cette survie est possible. J'imagine plutôt qu'un auteur voudra s'acoquiner avec un puissant correcteur et publiera lui-même son oeuvre en ligne, en permettant, pour quelques dollars, le téléchargement de son oeuvre.

Je crois cependant que le livre pédagogique (destiné aux écoles) doit rapidement quitter la scène.

En effet, la grande différence entre un livre pédagogique et un roman, c'est que le livre pédagogique est essentiellement plate, et on ne le lit que par petits bouts. On peut donc se permettre de faire cette lecture sur l'écran, car l'inconfort est de très courte durée. De plus, ce contenu on-line serait certainement plus vivant qu'une version papier. Imaginons le multimédia accompagnant les explications et les exercices, les questionnaires interactifs, l'envoi possible de courriel vers des aidants pédagogiques, les forums ouverts, le clavardage, etc., et on se trouve dans un véritable univers techno-pédagogique riche et stimulant.

Il faut donc immédiatement penser à ne plus publier de livres réservés au monde de l'éducation dans la province.

Ma suggestion ? Au lieu de financer des éditeurs de contenu pédagogique format papier, le MEQ devrait conserver les subventions et investir dans du contenu numérique tenu à jour. Ce contenu ne serait pas vendu dans les écoles mais serait plutôt distribué sous licence libre - style creative commons. En fait, le MEQ devrait ouvrir sa propre maison de production, devrait embaucher quelques équipes diversifiées d'éditeurs/pédagogues et leur donner les subventions normalement réservées aux éditeurs pédagogiques.

J'appuie sur le « équipes diversifiées » de la phrase précédente car je pense qu'on pourrait produire plusieurs modèles différents issus d'un même contenu. Par exemple, deux équipes différentes pourraient travailler sur la trigonométrie. L'idée est d'offrir des façons variées d'enseigner/apprendre/illustrer/webaliser le même contenu tout en évitant le piège de la pensée unique. Idéalement, tout devrait être reconfigurable pour que l'élève puisse lui-même choisir comment il désire apprendre. Par exemple, l'élève pourrait s'accaparer de l'explication du théorème de Pythagore dans le cours X, mais choisir l'explication de la loi des sinus du cours Y. Imaginez les enseignants qui, par leurs observations/suggestions pourraient contribuer à l'amélioration du contenu.

Tout ça est un rêve, mais donnez-moi quelques millions* pour payer les auteurs/concepteurs (il est question ici de penseurs-web, non pas de penseurs-papier, car ces derniers causent une perte énorme de temps et d'énergie), les programmeurs, quelques ordinateurs et quelques années (cinq tout au plus) et je vous garantis la réalisation du rêve.

* On ne sait jamais... un mécène pourrait lire ce billet et juger l'idée intéressante.