La richesse

Prendre la pie au nid.

Sommaire. - Des couverts dans un clocher. - Erreur judiciaire. - À la cime des arbres.

La pie présente certaines particularités : elle babille, jacasse, claquète; aussi lui assimile-t-on certains êtres humains, « bavards comme une pie ».

Elle a le goût de dérober ce qui brille ; ce qui a fait condamner à mort et exécuter une brave servante de Palaiseau faussement accusée d'avoir volé des couverts d'argent qu'une pie avait pris dans son bec et cachés dans un clocher. Ce larcin de l'oiseau et l'erreur judiciaire qui en fut la conséquence nous valurent un drame à succès : La Pie Voleuse, et un bel opéra : La Gazza Ladra.1

La pie possède aussi la manie d'affectionner, pour établir son nid, la branche la plus haute de l'arbre le plus élevé qu'elle puisse trouver. Une fois ainsi perchée, elle ouvre l'oeil et l'oreille et guette. Bien agile, bien adroit, bien rusé qui pourrait monter jusqu'au nid et l'y surprendre. Quiconque se targuerait d'avoir réussi passerait pour vantard et se ferait gausser de lui.

Mathurin Régnier se moquait de même de « ces resveurs dont la muse insolente censure les plus vieux » :

Il semble en leurs discours hautains et généreux
Que le cheval volant2 n'ait passé que pour eux;
Que Phoebus à leur ton accorde sa vielle;
Que la mouche du Grec leurs lèvres emmielle ;
Qu'ils ont seuls icy bas trouvé la pie au nit,
Et que des hauts esprits le leur est le zénit.3


1 La Gazza Ladra, opéra de Rossini (1817)
2 Pégase.
3 Mathurin Régnier, À Monsieur Rapin, satire IX.

Émile Genest, Miettes du passé, Collection Hetzel, 1913. Voir la note du transcripteur.