Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

lundi 18 février 2008

Accromath 3

Jolie surprise qui m'attendait aujourd'hui au bureau.


En page 16, on trouve ces belles preuves sans mots.



La revue n'est pas encore disponible sur le site, mais cela ne saurait sans doute tarder.

Beauté VI

Demandez à un crapaud ce que c’est que la beauté, le grand beau, le to kalon. Il vous répondra que c’est sa crapaude [...] (Voltaire, Dictionnaire philosophique)



La géométrie plane exerce sur moi une profonde fascination. Depuis l'apparition des mathématiques dites modernes en pédagogie (fin des années 60), les programmes ont laissé tomber une grande part de la géométrie plane classique (axiomes, prépositions, théorèmes, preuves...) pour la remplacer par des bidules plus utilitaires du genre description de solides ou de figures planes, application de certains théorèmes, etc.

Pourtant, l'un des très grands intérêts de la géométrie réside dans la créativité exigée pour démontrer des théorèmes. Il me semble aussi qu'on peut goûter à la beauté intellectuelle en visionnant certains résultats. Voyez par exemple cette illustration du théorème de Thébault, découvert en 1937.

Sur les côtés d'un parallélogramme, on construit des carrés. Le théorème dit que si, à partir des centres de ces carrés, on construit un polygone alors ce polygone sera aussi un carré !


Dans la figure, vous pouvez déplacer les points A, B et C pour vous persuader de la validité du théorème. La molette de votre souris agrandit ou rétrécit l'image.

Il reste bien sûr à le démonter rigoureusement. Mais je m'intéresse plutôt à l'émotion engendrée par le théorème. Trouvez-vous ce théorème BEAU? Vous laisse-t-il indifférent? Dans l'un comme dans l'autre cas, comment expliquer les sentiments ressentis? Comment se fait-il que certaines personnes soient atteintes par un tel résultat, alors que d'autres n'y voient que de la bouillie pour les chats ou une incommensurable perte de temps?

La situation est semblable en art. Comment se fait-il que certains soient charmés par une fugue de Bach, alors que d'autres s'ennuient à son écoute? qu'un poème de Nelligan nous laisse insensibles alors que d'autres en pleurent d'émotion?

Je n'ai pas de réponse, et il me semble que s'il y en avait une, elle me décevrait. Car j'aime bien cette différence. Cela me rappelle que l'autre est un mystère, non pas une machine bien programmée. La beauté se trouve dans à peu près tout. Au cerveau de décider. « Que l'importance soit dans ton regard, non dans la chose regardée », disait Gide. Et n'est-ce pas là notre rôle, comme parents ou pédagogues, de reconnaître la flamme dans le regard d'un enfant?