mardi 29 août 2006
Écrire à l'école
Par Gilles Jobin, mardi 29 août 2006 :: Généraleries
Louis Aragon, Traité du style.
Ce paragraphe dans un article publié sur l'Infobourg m'a fait un peu sourciller.
Dans la classe de Nancy Ouellet, enseignante de cinquième année à l'école Val-Joli de Val-Bélair, tous les élèves de la classe ont un ordinateur portable. Les enfants sont toutefois obligés d'écrire leur brouillon à la main, indique Mme Ouellet. « Il faut qu'ils réfléchissent par eux-mêmes aux accords de verbe et à l'orthographe », dit l'enseignante.Écrire son brouillon à la main ferait réfléchir ! Permettez-moi d'en douter. Le crayon, la dactylo, le traitement de texte ne sont que des ustensiles facilitant le jet d'une idée sur un certain support.
Il me semble que l'ordinateur-outil est fameux pour justement aider la réflexion, faciliter le travail de la phrase, permettre de trouver le mot juste, jouer à l'essai-erreur. Par exemple, la phrase suivante : Comment oser croire, après de pareilles menaces, qu'il revienne? L'enseignant pourrait demander à l'élève de reformer sa phrase pour modifier l'atmosphère :
Comment oser croire qu'il revienne, après de pareilles menaces?
ou encore :
Après de pareilles menaces, comment oser croire qu'il revienne?
Ne sent-on pas toute la subtilité dans ces transformations ? Rapprocher le qu'il revienne du oser croire donne un effet complètement différent. Comment tenter ces essais sur le papier ? Une bonne utilisation du traitement de texte ne permet-il pas ces jeux de phrases sans que cela soit trop pénible ?
Transcrire d'abord à la main m'apparaît à cet effet une pure perte de temps, temps qu'il vaudrait mieux investir dans le travail même sur les mots, sur les phrases, sur le texte. Écrire, c'est d'abord essayer d'écrire.