Ce qui est fait pour tout le monde n'est fait pour personne.
C. Bobin


Des ordis dans un laboratoire ou dans les classes? Cette question lancée sur la liste (privée) des animateurs de RÉCIT, étonnament, me laisse à peu près indifférent. Comment analyser chez moi cette désertion de la question?

Première observation/commentaire. Une enseignante d'anglais m'a aujourd'hui mentionné qu'elle avait amené ses élèves de première année du 3e cycle en laboratoire informatique. Et que c'était la première fois de l'année que ces élèves touchaient à un ordinateur !!! À mon avis, il est certain que le titulaire de cette classe aura de la difficulté à évaluer la compétence transversale TIC. Et clairement, ce titulaire se fiche éperduement de cette transversale.

Deuxième observation/commentaire. C'est au pédagogue de choisir ses outils de travail.

Troisième observation/commentaire. On ne demande jamais à l'élève ce qu'il désire vraiment. Il doit entrer dans un moule. Que ce soit le moule de la Réforme, le moule de l'enseignement privé, le moule de l'enseignement par objectifs, le moule de l'enseignement internationnal, c'est jamais lui qui décide!

Ces trois observations sont pour moi très liées à mon indifférence. D'abord, la responsabilité de « passer le programme » revient à l'enseignant. S'il ne fait pas son travail, c'est à son superviseur (généralement un directeur d'école débordé because gestion administrative) d'aider/supporter/encourager cet enseignant à se fixer des objectifs d'apprentissage propres à lui-même et à suivre cet enseignant dans ses démarches. Le fait que les ordis soient en classe ou en labo n'y change absolument rien. Il y a un minimum à assurer au niveau des interactions humaines : aider/partager/construire ses propres conceptions/valeurs pédagogiques.

Par ailleurs, si un enseignant est mal à l'aise avec l'idée de la gestion de classe en laboratoire (c'était mon cas) je vois très mal qu'une décision «externe» vienne forcer cet enseignant à vivre une situation qu'il juge infernale et intenable. C'est à l'enseignant (le professionnel en lui) de juger comment et avec quels outils il doit/espère amener les élèves à développer les compétences transversales. Je le répète, lui, et lui seul, doit en juger. S'il a des difficultés à porter ce jugement, son directeur d'école, ses collègues ou un conseiller pédagogique pourraient sans doute lui venir en aide à ce moment-là. Si la décision des ordinateurs en classe ou en laboratoire ne vient pas de lui, rien n'y changera.

L'élève.

- Que préfères-tu, des ordis en classe ou en labo?
Sa réponse sera presqu'invariablement :
- Chez moi, je préfère chez moi, car là, au moins, ça marche bien et je fais ce que je veux.
- Oui, mais apprends-tu quelque chose?
- ???
- Est-ce que ça t'aide dans tes études?
- ???
- Tu réponds pas?
- Bien, m'sieur, que voulez-vous que je vous réponde? Chez moi, je «tchatte», je fais du courriel, je «download» de la musique, je joue à des jeux super-le-fun. Pis des fois, je m'amuse à faire du dessin avec un bon logiciel que mon père a acheté, pis je construis aussi des «wads» pour Quake, pis...
- Oui, oui, mais apprends-tu quelque chose?
- ???
D'après moi, cet enseignant questionneur vient d'une autre planète et ne touche à peu près jamais à un ordinateur.

Pour cet élève, des ordis en classe ou en labo, il n'en a fichtrement rien à faire...