Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

samedi 31 mars 2012

Chemin faisant, page 95

Ce qu'il y a toujours de plus incontestablement vrai dans l'intérêt qu'on nous montre, c'est le nez de la curiosité.

Il y a des mots qui ordonnent, qui tranchent, qui coupent; d'autres qui font l'effet de lanières sur le coeur humain.

C'est une infériorité du blason que de ne pouvoir être comme l'or vérifié par le titre.

Que de femmes on mettrait bien en pantalon, et que d'hommes en jupon !

Oh! les belles heures, où l'âme est jeune, où le coeur est libre, où l'esprit est frais comme un bouton entr'ouvert ! Aucune poussière ne s'est montrée sur la route, aucune ride sur la joue de l'espérance ; la joie carillonne dans l'air, et la confiance bat de l'aile avec défi.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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vendredi 30 mars 2012

Chemin faisant, page 94

Les gens ruinés sont comme les malades, ils n'intéressent pas tous au même titre : ne pas confondre prodigalités et revers.

Jouir seul est presque aussi difficile que souffrir seul : pauvre humanité !

On jouit de sa liberté sans s'en servir.

Les regrets font-ils marcher plus lentement le corbillard et le mort en est-il moins cahoté ?

Il y a de la cruauté à tenter l'ancien coupable.

Ce n'est qu'au retour de Capoue qu'on peut se dire vertueux.

On a de la désinvolture dans l'esprit comme dans le corps.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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jeudi 29 mars 2012

Chemin faisant, page 93

Laissons venir les ans, comme Notre-Seigneur laissait venir à lui les petits enfants.

Partout où je vois le bon sens, je me sens en sûreté.

Tous les témoignages ne nous flattent pas, toutes les parures ne nous vont pas.

L'observateur est comme l'armateur : tous les voyages ne l'enrichissent pas.

De vieux yeux avides, de vieilles mains cramponnantes, de vieilles soifs haletantes, je ne sache rien de plus odieux.

On n'est pas plus sûr de trouver la simplicité derrière une fille pauvre que le bonheur derrière une fille riche.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mercredi 28 mars 2012

Chemin faisant, page 92

On jouit plus de son luxe quand on sent qu'il ne vous est pas indispensable.

L'homme qui croit entre en intimité avec son Dieu.

Qu'il y a de puissance dans un regard, de mystère dans un sourire, d'amertume dans une larme !

Le tact a la prudence de l'aïeul et la sensibilité de l'enfant.

Des yeux secs sont souvent plus navrants à voir que des yeux pleins de larmes.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mardi 27 mars 2012

Chemin faisant, page 91

Une chose très pénible à constater quand on a beaucoup souffert, c'est d'avoir perdu de sa pitié.

La magie des mots a fait autant que la puissance de la logique.

Faire le tour d'un esprit c'est quelquefois plus difficile que de faire le tour du monde.

Je n'aime pas plus les roses déformées par la culture que je n'aime les jeunes filles émancipées par la société.

Pour dominer une position il faut être fort; pour dominer un homme, ce n'est pas nécessaire.

Tout s'apprend, surtout l'art de vivre.

Le désir qu'une veuve exprime de se remarier ne devrait pas plus se dire qu'un secret de cabinet de toilette.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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lundi 26 mars 2012

Chemin faisant, page 90

Il ne faut rien aimer, même son pays, plus que son honneur.

Il est aussi antipathique de penser avec certaines gens que de se laisser embrasser par certaines lèvres.

Un coeur tendre a toujours besoin d'adoption.

La mort se met en route tous les matins et tous les soirs, et comme tout se gare à son approche, elle n'a jamais de retard.

De même que les oiseaux aiment tout ce qui chante, les serpents aiment tout ce qui rampe, les loups tout ce qui hurle.

La souffrance est une pourpre pour le saint.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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dimanche 25 mars 2012

Chemin faisant, page 89

On a toujours un désir malicieux embusqué dans quelque coin.

Le public est comme la mer, il gronde sans savoir pourquoi.

Les vallées suivent fidèlement les fleuves, mais les fleuves, j'en suis sûre, ont bien souvent envie de quitter les vallées.

On regrette presque d'avoir dit la vérité quand on ne vous a pas cru.

Le sort du navire est entre les mains de celui qui le dirige, et chacun de nous est capitaine d'un navire.

Pour éviter une scène, faites-la. r

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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samedi 24 mars 2012

Chemin faisant, page 88

Les grelots s'attachent à toutes les choses à la mode.

Le chant du serin ne gêne pas le rossignol, et le chant du rossignol ne gêne pas le serin.

L'oiseau couve, l'amour vagabonde, la sève se dépense, les vieux membres souffrent : c'est le renouveau.

Les hésitants encombrent le chemin.

Il en coûte souvent beaucoup à nos forces pour sortir de leur fourreau.

Toutes nos joies frétillent, tous nos désirs lèvent la tête quand vient le printemps.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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vendredi 23 mars 2012

Chemin faisant, page 87

Il est nécessaire d'être bon, digne d'être juste, avantageux d'être sobre, charmant d'être braque de temps en temps.

D'aplomb sur sa selle on peut braver le danger, le tout est de s'y mettre d'aplomb.

Partout où vous demanderez, on vous demandera.

Les sottises humaines, lasses d'aller à pied, se promènent quelquefois sur des échasses.

Le sacrifice, c'est comme le sinapisme, on en parle à son aise quand on ne le sent pas.

Devoir avec bonheur, que c'est aimer avec force !

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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jeudi 22 mars 2012

Chemin faisant, page 86

Il y a mille beautés, il n'y a qu'une logique.

Faire la guerre à l'amour, c'est avoir contre soi toutes les forces de la nature, tous les courroux de la jeunesse, toutes les malédictions de l'espérance.

Comme on fait son lit on se couche, mais on se couche souvent dans un lit tout fait.

La vie est un bienfait dont le meilleur bienfait est la mort : ne plus craindre pour ceux qu'on aime!

On ne redresse pas un bossu, on ne désaltère pas un ambitieux.

Quelle agréable intimité entre soi et sa plume ! le ménage de deux tourtereaux.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mercredi 21 mars 2012

Chemin faisant, page 85

Une oeuvre de pure imagination doit rappeler le boudoir d'une coquette : un peu de désordre n'en diminue pas l'agrément.

J'ai quelquefois éprouvé une vigoureuse jouissance à être mal jugée.

Les vieilles épaules devraient se cacher, car elles n'ont même pas pour elles les vieux démons.

L'élégance est moins capricieuse que la mode ; elle a des lois.

Les enfants trop doux me font peur ; les couleurs trop tendres, je les admire en gémissant.

Les fleurs demandèrent un jour la parole aux dieux, et c'était pour défendre les papillons !

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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mardi 20 mars 2012

Chemin faisant, page 84

Nos passions se rhabillent avec nous tous les matins.

Les grandes espérances, comme les grands lévriers, aiment les grands chemins.

Le Français s'écoute, l'Anglais se mesure, l'Allemand se pèse, l'Italien se mire, l'Espagnol se glorifie.

Le dernier mot de l'analyse, c'est le dégoût ou le pardon.

Les principes sont des points de refuge, où l'homme se gare de la passion.

Il est difficile de porter l'automne d'un coeur qui n'a pas eu de printemps.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

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