Miette 46 : À trompeur trompeur et demi
Par Gilles Jobin, dimanche 3 juin 2012 :: Mietteries :: #1497 :: rss
À trompeur trompeur et demi.
A regnard1, regnard et demi2,
Il n'est si fin regnard
Qui ne trouve plus finard3.
Quand on essaie de tromper, il peut fort bien arriver que l'on ait affaire à plus habile que soi et qu'on n'obtienne d'autre réussite que d'être trompé à son tour avec usure.
D'après La Rochefoucauld :
« La plus subtile de toutes les finesses est de savoir bien feindre de tomber dans les pièges qu'on nous tend ; et l'on n'est jamais si aisément trompé que quand on songe à tromper les autres. »
Au surplus, voici une modeste petite fable qui expliquera la morale de ce proverbe :
Un renard, voyant des poules juchées, avec leur coq, dans une cour, tâchait de les attirer par de belles paroles :
« J'ai, dit-il, une bonne nouvelle à vous apprendre : c'est que les animaux ont tenu un grand conseil, et ont fait entre eux une paix éternelle. Descendez et célébrons cette paix de bonne amitié. »
Le coq, plus fin que le renard, se dresse sur ses ergots et regarde de tous côtés.
« Que regardez-vous ? dit le renard.
- Je regarde deux maîtres chiens qui s'avancent. »
Et renard de fuir à toutes jambes.
« Eh! dit le coq, pourquoi fuyez-vous? la paix est faite entre les animaux.
- Oh ! réplique le renard en se retournant, mais fuyant de plus belle, peut-être que ces deux chiens n'en savent pas encore la nouvelle. »
Voilà une bonne petite leçon de diplomatie.
1 Ancienne orthographe du mot « renard ».
2 et 3 Trésor des Sentences, de Gabriel Meurier.

Émile Genest, Miettes du passé, Collection Hetzel, 1913. Voir la note du transcripteur.


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Gilles Jobin
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