Jobineries

Blogue de Gilles G. Jobin, Gatineau, Québec.

samedi 14 avril 2012

Chemin faisant, page 109

Nous cachons tant de choses inutiles à cacher, nous en dévoilons tant d'autres inutiles à dévoiler!

Pour être agréables aux autres, nos qualités ne doivent pas peser plus que leur poids.

Nous ne sommes pas fiers avec le bonheur : il a beau nous tourner le dos, nous voulons toujours de lui, comme certaines femmes du mari dont elles sont battues.

De grosses larmes tombaient le long de ses ailes scintillantes; pauvre papillon! Pour une course un peu trop vagabonde, le roi des bêtes venait de le condamner à confectionner un nid.

Revanche du sort : Personne ne sait mieux se faire servir qu'un domestique à l'hôtel.

Anne Barratin, Chemin faisant, Ed. Lemerre, Paris, 1894

Lire le premier billet consacré à cette série.

Miette 32 : Faire l'âne pour avoir du son

La richesse

Faire l'âne pour avoir du son.

Sommaire. - Manger pour vivre. - II faut savoir s'y prendre. - Bête et animal.

Il ne faut pas « vivre pour manger », c'est un point acquis, et nous sommes en cela d'accord avec le seigneur Harpagon; ce qui est non moins indiscutable, c'est qu'il est indispensable de manger pour vivre. Or, pour manger, il faut avoir quelque chose à se mettre sous la dent ou les moyens de se le procurer.

Chacun s'ingénie à trouver sa pâture ; les procédés sont multiples; le préférable est celui qui donne le meilleur résultat.

Dans tous les cas, on atteint le but rêvé peu ou prou, aux dépens de son prochain, chacun suivant sa manière. Les uns procèdent par le travail, les autres par l'habileté, certains par la malice, d'aucuns par la flatterie. Il n'en manque pas qui affectent la niaiserie ou l'imbécillité pour tromper plus aisément et faire des dupes.

Dans ces dernières catégories, il convient déclasser ceux qui font l'âne pour avoir du son, ou du chardon, c'est tout comme. N'a-t-on pas dit d'ailleurs que

.... Tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute ?1

Réflexion faite, quel est le plus âne des deux, lequel mérite mieux le nom de « bête », celui qui singe l'âne pour avoir du son, ou celui qui est assez « bête » pour fournir le son ?


1. La Fontaine, Le Corbeau et le Renard, livre I, fable 2.

Émile Genest, Miettes du passé, Collection Hetzel, 1913. Voir la note du transcripteur.