Je réponds ici à un éditorial paru aujourd'hui sur l'Infobourg. En citation, les propos de l'Infobourg.
[M. Bibeau] n’est pas d’accord avec la dichotomie que monsieur Jobin fait des TIC, à savoir qu’il y aurait des TIC « ustensiles » (traitement de texte, chiffrier, logiciel de présentation) et des TIC « pour changer le rapport de l’élève au savoir » (blogue, wiki). « Comme s’il y avait des TIC honteuses et d’autres tout à fait dans le vent; des TIC antipédagogiques et d’autres intrinsèquement pédagogiques, comme si ceux qui utilisent les premières étaient dans l’erreur et faisaient fausse route », soutient-il.
Je n'ai jamais parlé de TIC honteuses et antipédagogiques. Je dis qu'utiliser l'informatique comme ustensile est bien différent de l'utiliser comme extension et amplification de la pensée. À l'école, tout le monde fait de la bureautique à des niveaux adaptés aux jeunes. Est-ce honteux? Certainement pas, et je trouve très malheureux que M. Bibeau croit que je le pense. Quant au mot antipédagogique, je ne l'ai jamais mentionné. Je ne l'ai même jamais pensé.
Bien sûr que je crois qu'il y a des différences importantes entre l'utilisation d'un traitement de texte et l'utilisation d'un blogue. Mais que ce soit pour l'un ou pour l'autre, on peut en faire un acte pédagogique ou non. Je crois cependant que l'utilisation d'un blogue est beaucoup plus intégrateur que l'utilisation de Word. C'est tout.
D’ailleurs, n’oublions pas que les enfants d’aujourd’hui ont besoin d’apprendre à se servir d’outils comme le traitement de texte puisqu’ils auront pratiquement tous à les utiliser au cours de leur vie professionnelle à venir.
Bien sûr ! Mais 11 ans de Word et de PowerPoint, c'est un peu long, non?
Par exemple, il précise qu’un blogue sans lecteur et surtout sans commentateur n’arrivera pas à ses fins, notamment l’interaction entre les élèves. Il faut donc une certaine animation, un suivi pédagogique. Un projet où les élèves prépareraient un document PowerPoint ou Impress, puis le présenteraient à d’autres élèves par le biais de la vidéoconférence pourrait aussi les amener à interagir.
Un blogue sans lecteurs? Diable, le web est un véritable cimetière de blogues et de sites. Comment savoir si un blogue est sans lecteur? Il ne faut pas oublier que bloguer, c'est d'abord écrire. Que ce soit à la suite de la lecture d'un livre, du visionnement d'un film, d'une participation à l'harmonie de l'école, etc. il faut bien attendu un suivi pédagogique ! Qui dirait le contraire ?

Un blogue scolaire doit-il être différent d'un vrai blogue? À chacun de répondre. Pour ma part, le blogue est un outil extraordinaire de développement de la personne, de la structuration de la pensée, et de bien d'autres choses encore. Pour moi, un élève qui blogue, c'est d'abord être un humain qui blogue. Voilà pourquoi j'aime bien l'approche de Rochebelle ou celle de Mario Cyr (Philoblogue) : on laisse l'élève libre d'utiliser ou non l'outil. Et on l'entoure d'une aura pédagogique.

Bien sûr que l'utilisation ustensile d'un outil (comme PowerPoint) peut amener les élèves à interagir. Mais cela demeure une utilisation ustensile. Est-ce de l'intégration des technologies? Si on répond oui, alors mea culpa, ça va très bien au Québec.
« Il faut se mettre au niveau de chaque enseignant et chercher à répondre à ses besoins particuliers. Il faut lui demander : qu’est-ce que tu veux faire? Et après, on lui présente les possibilités. Si c’est un blogue qui répond le mieux, on y va pour le blogue. Mais il se pourrait aussi qu’une présentation PowerPoint fasse l’affaire. Alors là, il ne faut pas dénigrer cette option ».
Mais loin de moi l'idée de dénigrer cette option. La semaine dernière, j'ai répondu à une demande de toute une école qui voulait une formation OpenOffice. Cette semaine, je rencontre des enseignants qui veulent en savoir plus sur Scribus. Mais, et j'y reviens, c'est là de l'informatique ustensile. En tant que conseiller pédagogique, je prends certainement les gens où ils sont, mais mon rôle est de les amener beaucoup plus loin. Or, depuis 25 ans, comment se fait-il qu'on en soit encore à de l'informatique ustensile? N'y aurait-il pas lieu de questionner fortement nos formations? À petits pas, nous stagnons. C'est tout.
« Attention », répond monsieur Bibeau, qui a déjà évalué qu’une telle opération coûterait entre 1 et 2 milliards de dollars au Québec. « Il faut se demander quels seront les bénéfices tangibles et réels compte tenu de l’ampleur de la dépense? Est-ce qu’il s’agit du besoin le plus urgent dans le monde de l’éducation? »
La réponse est simple et évidente. D'ailleurs elle est dans mon billet : NON, ce n'est pas un besoin urgent. Voilà pourquoi tout le monde s'en fout. Bien sûr qu'à Québec on voit ma proposition comme une dépense. Pour moi, c'est un investissement. Mais investir sans avoir la foi que cela sera rentable est effectivement suicidaire. Moi, je crois en la rentabilité de cet investissement. De toute évidence, nos élus et les fonctionnaires ne sont pas de cet avis.
Par ailleurs, ce n’est pas tout de posséder un ordinateur, encore faut-il savoir en tirer profit pédagogiquement… « Je connais des écoles où des ordinateurs dorment dans des boîtes parce que personne ne sait quoi en faire », affirme-t-il.
Je connais des dizaines et des dizaines d'enseignants qui voudraient bien faire quelque chose de pédagogique avec les TIC mais qui n'ont même pas d'ordinateur. Si des ordinateurs dorment dans des boîtes, cela veut dire que le leadership pédagogique de cette école est absent. Qu'on y change la direction de l'école, ça presse!
« Il ne faut pas penser que les élèves pensent à apprendre quelque chose aussitôt qu’ils ouvrent l’ordinateur. Il faut les guider dans leur utilisation pour que celle-ci devienne instructive et donc pédagogique », rappelle monsieur Bibeau.
C'est vrai pour un ordinateur. Mais c'est aussi vrai pour n'importe quel livre, n'importe quelle ressource. Mais pour que l'enseignant puisse guider un élève avec un ordinateur, ne faut-il pas au moins que cet enseignant et cet élève aient un ordinateur ???