Bien écrire, c'est comme marcher droit.
Louis Aragon, Traité du style.


Ce paragraphe dans un article publié sur l'Infobourg m'a fait un peu sourciller.
Dans la classe de Nancy Ouellet, enseignante de cinquième année à l'école Val-Joli de Val-Bélair, tous les élèves de la classe ont un ordinateur portable. Les enfants sont toutefois obligés d'écrire leur brouillon à la main, indique Mme Ouellet. « Il faut qu'ils réfléchissent par eux-mêmes aux accords de verbe et à l'orthographe », dit l'enseignante.
Écrire son brouillon à la main ferait réfléchir ! Permettez-moi d'en douter. Le crayon, la dactylo, le traitement de texte ne sont que des ustensiles facilitant le jet d'une idée sur un certain support.

Il me semble que l'ordinateur-outil est fameux pour justement aider la réflexion, faciliter le travail de la phrase, permettre de trouver le mot juste, jouer à l'essai-erreur. Par exemple, la phrase suivante : Comment oser croire, après de pareilles menaces, qu'il revienne? L'enseignant pourrait demander à l'élève de reformer sa phrase pour modifier l'atmosphère :

Comment oser croire qu'il revienne, après de pareilles menaces?

ou encore :

Après de pareilles menaces, comment oser croire qu'il revienne?

Ne sent-on pas toute la subtilité dans ces transformations ? Rapprocher le qu'il revienne du oser croire donne un effet complètement différent. Comment tenter ces essais sur le papier ? Une bonne utilisation du traitement de texte ne permet-il pas ces jeux de phrases sans que cela soit trop pénible ?

Transcrire d'abord à la main m'apparaît à cet effet une pure perte de temps, temps qu'il vaudrait mieux investir dans le travail même sur les mots, sur les phrases, sur le texte. Écrire, c'est d'abord essayer d'écrire.