Citations ajoutées le 17 juillet 2009

  
Milan Kundera

  1. [...] Notre expérience la plus banale nous apprend (surtout si la vie derrière nous se prolonge trop) que les visages sont lamentablement pareils (l'avalanche démographique insensée augmentant encore cette sensation), qu'ils se laissent confondre, qu'ils diffèrent l'un de l'autre par quelque chose de très menu, d'à peine saisissable, qui, mathématiquement, ne représente souvent, dans la disposition des proportions, que quelques millimètres de différence. Ajoutons à cela notre expérience historique qui nous a fait comprendre que les hommes agissent en s'imitant l'un l'autre, que leurs attitudes sont statistiquement calculables, leurs opinions manipulables, et que, donc, l'homme est moins un individu (un sujet) qu'un élément d'une masse.
    (Une Rencontre, p.20, Gallimard/nrf, 2009)
     
  2. Où est la frontière derrière laquelle un « moi » cesse d'être un « moi » ?
    (Une Rencontre, p.22, Gallimard/nrf, 2009)
     
  3. Quand un artiste parle d'un autre, il parle toujours (par ricochet, par détour) de lui-même et là est tout l'intérêt de son jugement.
    (Une Rencontre, p.23, Gallimard/nrf, 2009)
     
  4. [...] L'art de notre moitié du siècle est encrassé par une logorrhée théorique bruyante et opaque qui empêche une oeuvre d'entrer en contact direct, non médiatisé, non préinterprété, avec celui qui la regarde (qui la lit, qui l'écoute).
    (Une Rencontre, p.23, Gallimard/nrf, 2009)
     
  5. Si, jadis, l'Histoire avançait beaucoup plus lentement que la vie humaine, aujourd'hui c'est elle qui va plus vite, qui court, qui échappe à l'homme, si bien que la continuité et l'identité d'une vie risquent de se briser.
    (Une Rencontre, p.41, Gallimard/nrf, 2009)
     
  6. L'Islande : des solitudes qui s'épient.
    (Une Rencontre, p.42, Gallimard/nrf, 2009)
     
  7. L'énigme de l'âge : un de ces thèmes que seul un roman peut éclaircir.
    (Une Rencontre, p.43, Gallimard/nrf, 2009)
     
  8. Et je me dis : n'est-ce pas justement cela, la biographie ? Une logique artificielle qu'on impose à une « succession incohérente de tableaux » ?
    (Une Rencontre, p.50, Gallimard/nrf, 2009)
     
  9. [...] c'est la répétition des scandales qui est la reine de tous les scandales !
    (Une Rencontre, p.51, Gallimard/nrf, 2009)
     
  10. [...] Seul le sens de l'humour peut déceler le manque d'humour chez les autres.
    (Une Rencontre, p.65, Gallimard/nrf, 2009)
     
  11. Je dis : « J'aime Joseph Conrad. » Et mon ami : « Moi, pas tellement. » Mais parlons-nous du même auteur ? J'ai lu de Conrad deux romans, mon ami un seul que moi je ne connais pas. Et pourtant, chacun de nous, en toute innocence (en toute impertinence innocente), est sûr d'avoir une idée juste sur Conrad.
    (Une Rencontre, p.73, Gallimard/nrf, 2009)
     
  12. [...] Les innovations formelles des grands maîtres ont toujours quelque chose de discret ; telle est la vraie perfection ; c'est seulement chez les petits maîtres que la nouveauté veut se faire remarquer.
    (Une Rencontre, p.86, Gallimard/nrf, 2009)
     
  13. [...] Si quelqu'un m'avait parlé des livres de Depestre avant que je ne les lise, je ne les aurais pas ouverts.
    Heureusement, je les ai lus sans savoir ce que j'allais lire et il m'est arrivé la meilleure chose qui puisse arriver à un lecteur ; j'ai aimé ce que, par conviction (ou par nature), je n'aurais pas dû aimer.

    (Une Rencontre, p.106, Gallimard/nrf, 2009)
     
  14. Il faut en effet une grande maturité pour comprendre que l'opinion que nous défendons n'est que notre hypothèse préférée, nécessairement imparfaite, probablement transitoire, que seuls les très bornés peuvent faire passer pour une certitude ou une vérité.
    (Une Rencontre, p.134, Gallimard/nrf, 2009)
     
  15. [...] Le ridicule de nos sentiments ne change rien à leur authenticité.
    (Une Rencontre, p.161, Gallimard/nrf, 2009)
     
  16. Confronté à son prochain, l'homme n'est jamais libre d'être tel qu'il est ; la force de l'un limite la liberté de l'autre. Face à un animal, l'homme est qui il est. Sa cruauté est libre. Le rapport entre l'homme et l'animal constitue un arrière-fond éternel de l'existence humaine, un miroir (miroir affreux) qui ne la quittera pas.
    (Une Rencontre, p.203, Gallimard/nrf, 2009)