Citations ajoutées le 04 janvier 2003

Albert Brie

  1. Le coup de foudre en amour, ne serait-ce pas une forme de violence dans la séduction ?
    (Le mot du silencieux (Bien fait qui s'y fie), Le Devoir)
     
  2. La franchise est ce curieux mélange d'une qualité et d'un défaut, dont il est difficile de mesurer les parts. Devant un exercice de franc parler, je me dis : « Où finit l'honnêteté et où commence la médisance ? »
    (Le mot du silencieux (Bien fait qui s'y fie), Le Devoir)
     

Pascal Quignard

  1. Je ne crois pas que l'art puisse jamais être négatif. Il ignore la négation parce qu'il ignore le temps. Avant d'échapper à la norme il s'approche du vivant. Il n'est pas excentrique : il est au coeur du centre. Il est l'acte, l'actitude de l'acte, l'exactitude du tao. La création ne se soustrait à rien du monde et à rien de la vie.
    C'est la vie même. C'est la voie même.

    (Les Ombres errantes, p.24, Grasset, 2002)
     
  2. Il n'est pas de menteur qui ne taise le fait qu'il ment.
    Le romancier est le seul menteur qui ne tait pas le fait qu'il ment.

    (Les Ombres errantes, p.49, Grasset, 2002)
     
  3. Il y a dans lire une attente qui ne cherche pas à aboutir. Lire c'est errer. La lecture est l'errance.
    (Les Ombres errantes, p.50, Grasset, 2002)
     
  4. Tout est égaré comme la goutte d'eau dans la nappe immense de la mer.
    Qu'est-ce que la mer ?
    Chaque océan est une larme du temps.
    Qui pleure au fond de l'Être ?

    (Les Ombres errantes, p.71, Grasset, 2002)
     
  5. Les artistes sont des meurtriers de la mort.
    (Les Ombres errantes, p.124, Grasset, 2002)
     
  6. Éprouver en pensant ce qui cherche à se dire avant même de connaître, c'est sans doute cela, le mouvement d'écrire. D'une part écrire avec ce mot qui se tient à jamais sur le bout de la langue, de l'autre avec l'ensemble du langage qui fuit sous les doigts. Ce qu'on appelle brûler, à l'aube de découvrir.
    (Les Ombres errantes, p.136, Grasset, 2002)
     
  7. On parle du courant du fleuve. Que serait le couru ? Le couru serait la source juste avant le jaillissement. Ce serait le perdu qui revient dans l'à venir du venir qui se perd. Au mot présent il faut préférer le mot plus sûr de passant. Le présent est le passant du temps. Mais de cela je doute. Je doute que le passant du temps soit sa source. Il est possible que dans le noyau du temps le passé soit l'énergie (le noyau, le trou noir qui gît au sein de l'affluence, qui déclenche le flux). Comme le mot courant dit quelque chose de plus profond que toute l'eau du fleuve.
    (Les Ombres errantes, p.168, Grasset, 2002)
     

Michel Tournier

  1. Découvrir, inventer, créer, il y a une affinité profonde entre ces trois démarches. Inventer, c'est étymologiquement invenire : aller-à, c'est-à-dire découvrir et créer. Rappelons qu'en termes juridiques celui qui « découvre » un trésor, s'appelle « l'inventeur » de ce trésor. Et il est bien vrai qu'avant son intervention, le trésor n'existait pas. C'est sa découverte qui l'a fait exister avec en plus un effet rétroactif.
    (Journal extime, p.,10 La Musardine, 2002)
     
  2. Sa fonction [au chef d'orchestre] est d'incarner la musique avec tout son corps.
    (Journal extime, p.21, La Musardine, 2002)
     
  3. J'entre chez M.L. et son chien se précipite sur moi en aboyant. J'ai un mouvement de recul. M.L. : « De quoi as-tu peur ? Tu sais bien qu'un chien qui aboie ne mord pas ». Moi : « Oui, mais lui le sait-il ? »
    (Journal extime, p.29, La Musardine, 2002)
     
  4. Proverbe arabe : Celui qui prétend tout comprendre s'expose à mourir de colère.
    (Journal extime, p.30, La Musardine, 2002)
     
  5. Avoir, comme on dit, « un pied dans la tombe », ce n'est pas être malade, c'est avoir enterré la moitié de ceux qu'on aime.
    (Journal extime, p.39, La Musardine, 2002)
     
  6. Pour vivre à deux, il importe plus de bien dormir que de bien coucher ensemble.
    (Journal extime, p.42, La Musardine, 2002)
     
  7. « J'ai compris ce qu'est l'obscurité, dit l'aveugle. C'est quand tu ne me touches plus. »
    (Journal extime, p.61, La Musardine, 2002)
     
  8. Livret scolaire : casier judiciaire.
    (Journal extime, p.95, La Musardine, 2002)
     
  9. Quand une souris voit passer une chauve-souris, elle s'écrit : « Oh un ange ! »
    (Journal extime, p.124, La Musardine, 2002)
     
  10. Un écrivain inspiré est celui qui est dépassé par son propre texte.
    (Journal extime, p.126, La Musardine, 2002)
     
  11. [...] Socrate avec ses questions sans queue ni tête et son principe absurde « Connais-toi toi-même » (qu'y a-t-il de moins intéressant au monde que moi-même ?).
    (Journal extime, p.213, La Musardine, 2002)
     
  12. Exiger toute la vérité, c'est faire preuve d'une présomption infinie. C'est en réalité se prendre pour Dieu. Car c'est supposer qu'on est capable de supporter toute la vérité sans faiblir, sans réagir de façon désordonnée, injuste, voire criminelle ou suicidaire. Ce qui est au-dessus des facultés humaines. Mais comment avoir la sagesse de dire : « Ne me donnez que la quantité et la qualité de vérité que je mérite » ?
    (Journal extime, p., La Musardine, 2002)
     

Ambrose Bierce

  1. Paix n. Dans les affaires internationales, période de duperie entre deux périodes de combats.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p., Rivages/Étranger, n°11)
     
  2. Panthéisme n. Doctrine selon laquelle tout est Dieu, en contradiction formelle avec celle selon laquelle Dieu est tout.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.205, Rivages/Étranger, n°11)
     
  3. Patience n. Forme mineure de désespoir, déguisée en vertu.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.207, Rivages/Étranger, n°11)
     
  4. Phare n. Construction élevée sise au bord de la mer, dans laquelle le gouvernement entretient une lampe et l'ami d'un politicien.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.210, Rivages/Étranger, n°11)
     
  5. Pharmacien n. Complice du médecin, bienfaiteur du croque-mort et ravitailleur de la vermine du cimetière.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.210, Rivages/Étranger, n°11)
     
  6. Philosophie n. Route comportant de nombreuses voies et qui s'étend de nulle part à rien.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.211, Rivages/Étranger, n°11)
     
  7. Plagier v. Emprunter la pensée et le style d'un autre écrivain que l'on a jamais, jamais lu.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.213, Rivages/Étranger, n°11)
     
  8. Politesse n. La plus acceptable des hypocrisies.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.216, Rivages/Étranger, n°11)
     
  9. Politique n. Lutte d'intérêts déguisée en débat de grands principes. Conduite d'affaires publiques pour un avantage privé.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.216, Rivages/Étranger, n°11)
     
  10. Présage n. Signe que quelque chose arrivera si rien ne se passe.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.223, Rivages/Étranger, n°11)
     
  11. Préjugé n. Opinion qui se promène sans moyen visible de transport.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.223, Rivages/Étranger, n°11)
     
  12. Prescription n. Conjecture du médecin qui fera que se prolongera avec un moindre mal la situation du patient.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.223, Rivages/Étranger, n°11)
     
  13. Prêtre n. Homme qui prend en charge nos affaires spirituelles afin d'améliorer ses affaires temporelles.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.225, Rivages/Étranger, n°11)
     
  14. Preuve n. Évidence ayant une once de plausibilité supérieure à son improbabilité. Témoignage de deux personnes face à celui d'une seule.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p., Rivages/Étranger, n°11)
     
  15. Prier v. Demander que les lois de l'univers soient annulées en faveur d'un unique pétitionnaire, indigne de son propre aveu.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.225, Rivages/Étranger, n°11)
     
  16. Projeter v. Se faire du souci à propos de la meilleure méthode pour aboutir à un résultat accidentel.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.229, Rivages/Étranger, n°11)
     
  17. Prophétie n. L'art et la manière de vendre sa crédibilité avec une livraison future.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.229, Rivages/Étranger, n°11)
     
  18. Raseur n. Personne qui vous parle quand vous souhaitez qu'elle écoute.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.234, Rivages/Étranger, n°11)
     
  19. Reconsidérer v. Chercher une justification pour une décision déjà prise.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.235, Rivages/Étranger, n°11)
     
  20. Réfléchir v. Peser les probabilités dans la balance du désir.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.236, Rivages/Étranger, n°11)
     
  21. Refus n. [...] Les refus appartiennent à différents degrés sur une échelle de valeur décroissante : le formel refus, le refus conditionnel, le timide refus et le refus féminin. Par certains casuistes, ce dernier est également appelé le refus consentant.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.237, Rivages/Étranger, n°11)
     
  22. Résolu adj. Obstiné dans une voie que nous approuvons.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.242, Rivages/Étranger, n°11)
     
  23. Révélation n. Livre fameux dans lequel Saint Jean le Divin cacha tout ce qu'il savait. Les révélations sont en fait effectuées par les commentateurs, qui ne savent rien.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.244, Rivages/Étranger, n°11)
     
  24. Révérence n. Attitude sacrée d'un homme envers un dieu, d'un chien envers un homme.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.245, Rivages/Étranger, n°11)
     
  25. [...] l'oeuvre la plus fascinante qui nous ait jamais été donnée reste Les Mille et une nuits.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.248, Rivages/Étranger, n°11)
     
  26. Route n. Ruban de terre au long duquel on peut cheminer depuis l'endroit où l'on s'ennuie jusqu'à l'endroit où il est futile d'aller.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.250, Rivages/Étranger, n°11)
     
  27. Ruse n. Ce qui tient lieu de cervelle aux imbéciles.
    (Le dictionnaire du Diable, trad. Bernard Sallé, p.250, Rivages/Étranger, n°11)